Lacaion faisait les cent pas dans la boutique du Lux, les mains croisées dans le dos et son interface de messagerie ouvert devant lui. Il attendait anxieusement des nouvelles de Kirito depuis ce matin, après avoir joué sa dernière carte. Cette histoire d'enlèvement s'était concrétisée quand l'épéiste noir lui avait confirmé avoir retrouvé la trace d'Ayura au vingt-sixième étage, retenue captive par la guilde Golden Hive. L'alchimiste savait qu'il était inutile de tenter d'aider son ami sur place, et avait donc opté pour un support indirect.

Le matin même, il avait transmis immédiatement les informations de l'adolescent à Surizã dans leurs moindres détails. Le plan restait identique: faire d'une pierre trois coups en éliminant une guilde officielle douteuse, fidéliser Twin Head Snakes en leur offrant l'un des joueurs les mieux équipés de ce monde, et se débarrasser de la personne la plus susceptible de les libérer de ce château. Il pourrait ainsi rester ici à jamais, se forgeant le monopole des échanges commerciaux, et profiter d'un endroit où il était le meilleur...

Cet étrange rêve doux-amer qu'il ignorait lui-même posséder l'avait effleuré un instant, avant qu'il ne modifie un simple détail dans son message, sans trop savoir pourquoi. Un nombre, rien de plus. Un "vingt-six" en "trente-cinq". Une ruine en forêt. Un rêve contre une réalité.

Il avait donc sciemment envoyé la guilde de PKs mercenaires dans un traquenard, le plus redoutable connu à ce jour. La Forêt de Myshe, celle dont il était très difficile de sortir, remplie de monstres dangereux, même pour un vétéran du front. L'informateur espérait deux choses par cette manœuvre: d'une part couper la possibilité à Rin de rappeler ces criminels à l'aide pour repousser Kirito, d'autre part que le système les débarrasserait d'un groupe entier de fous furieux. Mais à cette heure, aucun des deux espoirs ne s'était confirmé, d'où l'impatience qui habitait Lacaion.

L'homme en blanc se figea soudain et activa son [Ecoute], son cœur se serrant sous l'effet du stress. Il crut percevoir du mouvement à l'extérieur, et il retint son souffle quelques secondes, jusqu'à ce que la porte s'ouvrit avec fracas. Le bruit amplifié par la compétence lui vrilla les tympans et le fit sursauter, mais il resta sur place en regardant son invité surprise. Si la couleur des cheveux était proche, l'envie de meurtre affichée sur le visage de l'homme au catogan n'était en rien comparable à l'expression chaleureuse de l'adolescent en noir.

*Raté... On dirait que ma chance s'arrête là.* pensa-t-il en souriant tristement. Il avait gardé, quelque part au fond de lui, l'espoir que ce soit Kirito qui vienne ici le premier lui apprendre la bonne nouvelle. Il espérait que les monstres d'un palier aussi élevé parviendraient à terrasser cette bande de joueurs sans foi ni loi. Mais tout cela lui était refusé, tandis que Surizã et trois de ses hommes entraient dans le magasin.

"Toi... Tu m'as menti. Fallait le faire, pour oser nous tendre un piège comme ça. Moi qui croyais que l'on était du même bois, je me suis bien planté. Mais je vais corriger ça, maintenant."

Le katana à la lame vert sombre luisait d'une lueur menaçante sous les reflets du feu de cheminée, tandis que les trois sbires avaient également dégainé leurs armes.

"Tiens, vous avez fait vite. Mais à juger par votre état et votre nombre, vous ne vous en êtes pas sortis indemnes, je me trompe ?" lança-t-il d'un ton moqueur.

"Toi non plus, rassure-toi..."

Un sourire glacial et effrayant lui fit face, tandis que Romu, le grand guerrier à la hache de guerre, avança derrière le marchand naïf. Une lueur jaune vif l'alerta, trop tard, tandis que le skill Rumbling Horn le frappa de plein fouet entre les deux omoplates. L'impact couplé à la force colossale du guerrier l'envoya voler à travers le magasin, l'écrasant contre la vitrine près de la porte dans un grand bruit.

L'homme en blanc roula par terre et tenta de se relever rapidement, sonné, mais un nouvel éclair vert foncé illumina la nuit. Le skill de katana Tsujikaze, déjà rapide, fut exécuté avec une vitesse surhumaine à tel point que le coup demeura invisible aux yeux de sa victime. Lacaion vit à peine la lame du chef terminée sa course près de son épaule que l'onde de choc l'avait déjà frappé à la poitrine dans une entaille horizontale parfaite, le forçant à franchir la porte de la Safe Zone de son domicile pour finir sa course dans la neige.

L'indic' poussa sur ses jambes et profita de l'inertie de son corps pour terminer sa chute sur ses pieds, dérapant dans la poudreuse. Il porta la main à Noirelame mais se retrouva cerné par les quatre red players avant même d'avoir dégainé. Un bref coup d'œil à sa barre de vie lui indiqua qu'il venait de perdre plus d'un dixième de sa vitalité.

"Pas la moindre chance, hein..." murmura-t-il avec une voix désabusée.

Il tira sa fidèle dague de son fourreau, avec qui il avait récolté bon nombre de plantes inconnues de tous et une bonne quantité de joyeux souvenirs, et la leva vers le croissant de lune qui brillait parmi les étoiles. A sa grande surprise, un fin sourire, serein, trônait sur les lèvres de son reflet. Il laissa son bras retomber de quatre-vingt-dix degrés, et leva l'autre à l'opposé, formant un T au centre du carré ennemi. Il garda les yeux rivés vers la voûte céleste, profitant une dernière fois de ce spectacle magnifique dans une grande inspiration, avant le début des hostilités.

Récap':

Le temps sembla s'arrêter. Pas un nuage n'obscurcissait le ciel étoilé, et des images vinrent se superposer dans l'esprit de Lacaion. Son premier repas à la belle étoile avec Kawasuki et leurs nuits blanches à expérimenter sur papier les meilleures stratégies pour ce jeu qui n'en était pas un.

Souviens-toi, les monstres ici sont stupides comparés à nous. En tous cas, pour l'instant ! Ne sois pas plus bête qu'un vulgaire loup artificiel, on peut s'adapter et surtout, nous sommes deux. Couvre mes arrières comme d'habitude et laisse-moi gérer le danger dans ton dos, ok ?

L'alchimiste pivota par instinct, esquivant de justesse la dague particulière qu'il avait eu sur la gorge quelques jours plus tôt. Les yeux remplis de haine de Silk croisèrent les siens, tandis que la lueur de son Rapid Bite éclairait leurs visages rapprochés.

"SunEater et Benimaru sont morts dans cette foutue forêt par TA FAUTE !"

Le deuxième coup du Sword Skill que Lacaion connaissait bien s'enclencha quand le voleur aux yeux de fouine remonta prestement son bras vers la gorge de l'indic. Celui-ci profita de son expérience pour bloquer le bras du PK au niveau du coude avec sa main gauche, et riposta avec un Armor Pierce rapide et précis. Noirelame s'enfonça dans la gorge de l'attaquant jusqu'à la garde, tandis que la jauge de vie du mercenaire tombait rapidement vers l'orange.

Okay le bleu. Première règle pour survivre si t'aime pas le combat, te sépare pas de ton arme. Juste au cas où, si tu sors seul ou que la personne qui t'accompagne est... Occupée avec d'autres bestioles.

Le visage de la paladin, plutôt joli malgré son caractère, lui fit de nouveau des remontrances, les premières qu'il avait entendu ici depuis des mois. Un cri sauvage brisa le silence de la plaine tandis que Romu et le dernier membre inconnu chargèrent de concert. L'alchimiste se cambra et envoya d'un coup de pied dans le plexus le petit voleur s'écraser sur le manieur d'épée, dégageant par la même occasion la dague qu'il retourna lame vers le bas d'un geste souple. La grande hache à deux mains brillait d'une lueur rouge inquiétante, et la posture du géant laissait présager un coup vertical. Lacaion jaugea le timing serré et frappa le plat de la hache de sa petite dague, décalant juste assez le coup pour que l'arme meurtrière frôle son manteau. La parade réussie, il voulut contre-attaquer, mais la compétence de l'ennemi ne se limitait pas à un coup, contrairement à ce que laissait penser sa stature massive. La taille horizontale imprévue fit mouche et laissa une marque béante sur le ventre de l'alchimiste qui fut forcé de faire un pas en arrière pour ne pas être littéralement coupé en deux, titubant. Il força son corps à résister à l'inertie et écarta le bras droit pour utiliser Curve, une attaque rapide et avec un faible temps de latence. Mais ce bref délai demeura malgré tout trop long, et Surizã se stoppa en dérapant sur la droite de Lacaion, plus rapide que lui. Zekkū laissa une onde lumineuse flotter quelques instants dans le vide, tandis que le katana regagnait déjà son fourreau et que Noirlame se perdit dans la neige, à quelques mètres. La main qui tenait l'arme éclata en pixels en touchant la poudreuse, laissant le seul moyen de défense de l'informateur introuvable dans la pénombre.

- Merci beaucoup, Laca-San!

*Aah... J'espère que Kirito a pu sauver Ayura et qu'elle va bien.*

Le sourire angélique de la manieuse de rapière qui lui évoquait tant celui de sa sœur adorée se rappela à son souvenir, tandis qu'Alexander serra son moignon contre sa poitrine. L'épéiste profita de l'ouverture laissée par son chef pour utiliser Rage Spike en se relevant dans un mouvement fluide, fauchant la jambe gauche de l'allemand qui bascula en arrière, son appui disloqué à hauteur de genou. Les visages haineux laissèrent place au plafond d'un bleu profond presque noir, tandis que des larmes tombèrent en décalage avec leur auteur. Sa vue commença à se troubler sous la fatigue, et il percevait son environnement comme à travers une épaisse couche de coton.

- Lacaion... Merci. La moindre seconde que tu pourras nous faire gagner sera précieuse. Mais au bout du compte... S'exposer au danger, c'est mon quotidien pas vrai?

*Héhé... Prends ça, monsieur l'épéiste noir. Personne n'a dit que tu en aurais le monopole jusqu'au bout.*

Les quatre silhouettes vert sombre se rassemblèrent autour de lui, leur chef s'accroupissant près du corps mutilé de Lacaion.

"Et ben, tu auras été une sacrée plaie jusqu'au bout."

"Tu m'en vois ravi... Je vous devais bien ça en guise de cadeau d'adieu, après tout." cracha-t-il en souriant.

"Oh, ne crois pas qu'on en a fini, toi et moi. Tu vas m'être très utile, monsieur le copain de Kirito"

Les yeux marrons de l'alchimiste s'écarquillèrent une dernière fois à ces mots, tandis qu'une dague dentelée se planta dans son cœur et les ferma pour de bon.

Récap':

Une odeur de renfermé, humide et lourde. Une lumière vacillante, probablement provenant de torches. Un plic-ploc régulier, de l'eau qui goutte sur de la pierre. Toutes ces informations parvinrent à Lacaion, dont l'esprit sortait lentement du brouillard. Poussant un gémissement pitoyable, il ouvrit légèrement les paupières pour apercevoir son unique jambe.

"Enfin réveillé, princesse ?"

La voix grave et faussement amicale lui glaça le sang. Il leva brusquement la tête pour voir Surizã devant lui, assis sur un rocher en train de manger une pomme qu'il était en train de couper avec Noirlame. L'alchimiste voulut bouger, mais des liens solides le retenaient à une grosse stalagmite. Il parcourut la salle du regard, cherchant un point de repère quelconque, en vain. La cavité était aussi dépourvue de particularités que son hôte de compassion.

"Laisse-moi te souhaiter la bienvenue dans notre humble QG. Tu n'imagines pas la galère que cela a été de te ramener ici en vie. Silk a tenté de te tuer trois fois sur le trajet, et si Romu ne t'avais pas porté sur son dos, il aurait bien réussi, le bougre!" commença-t-il en agitant négligemment la précieuse dague devant son propriétaire.

Haletant et encore groggy, l'informateur força son cerveau a redémarré. Des bribes lui revinrent, ainsi que des morceaux de scène. Il s'était battu malgré le résultat couru d'avance. Il avait fait de son mieux pour mourir dignement et aider une dernière fois ces deux adolescents. Mais même cela lui était refusé, et il était désormais retenu prisonnier ici.

"...Pour...quoi ?" marmonna-t-il tant bien que mal.

Un ricanement bref lui répondit, et le chef des red players se releva pour s'approcher. Il s'accroupit pour avoir le visage à la même hauteur que celui de son captif.

"A ton avis ? Pour appâter l'épéiste noir, bien sûr ! Copains comme vous êtes, il va certainement rappliquer ici ventre à terre quand il saura que des vilains PKs t'ont enlevés, tu ne crois pas ?"

Lacaion dodelina de la tête, et rassembla toutes ses forces pour répondre d'un air qu'il voulait moqueur.

"Tu perds ton temps... Il a mieux à faire que de risquer sa vie pour un type comme moi."

*Ils ont dû utiliser une [Potion de sommeil] pour m'endormir jusqu'ici... J'ai donc perdu connaissance au moins une heure. Et vue ma quantité de vie, ça fait moins de deux. Nous sommes donc en pleine nuit du trente...* réfléchit-il laborieusement en tentant de rassembler les fragments de sa conscience tandis que les derniers effets du sédatif se dissipèrent.

Nouveau ricanement. Le leader n'en croyait pas un mot pour une raison inconnue, et ce manque d'informations donna une sueur froide à Lacaion qui émergea totalement.

"Que tu crois. Avec ce qu'on lui a laissé comme cadeau, je te garantis qu'il va rappliquer ici fissa. Enfin, une fois qu'il aura fait la fête à sa petite blondinette, je suppose. On a donc tout notre temps, toi et moi..."

Il fit un signe de tête adressé à une personne derrière l'informateur qui n'eut même pas le temps de se retourner. Le grand guerrier à la hache de guerre tira une chaîne qui était reliée à la cheville restante du trentenaire, le hissant la tête en bas. Il inspira profondément pour chasser son envie de vomir, et regarda inquiet le sourire du serpent s'élargir.

"J'ai été déçu de voir que ce n'était qu'un skin, moi qui pensais que tu avais au moins du stuff digne de ce nom... Je me suis encore planté sur ton compte, on dirait."

Il enfonça la dague dans le ventre du pendu jusqu'à la garde d'un geste très lent, et la fit tourner plusieurs fois à l'intérieur. Le souffle court, Lacaion s'efforça de se concentrer sur le sol pour ne pas inciter son cerveau à imaginer la douleur que cela engendrerait, guettant ses points de vie qui diminuaient rapidement.

"Mais bon, tu peux encore te racheter, mon ami ! C'est très simple..."

Il jeta la dague dans un coin, et se pencha à nouveau pour regarder sa victime dans les yeux.

"Dit moi tout ce que tu sais sur les compétences de l'épéiste noir."

"Qu'il maîtrise assez bien son épée pour tous vous éliminer avec une main dans le dos." dit l'indic' en affichant difficilement un sourire.

"Mauvaise réponse."

La main du tortionnaire saisit une des torches accrochée à la paroi et la planta d'un geste sec dans l'œil droit de Lacaion. La lumière et la chaleur étaient telles qu'il ne put retenir un long cri de douleur, tout les sens en alerte. Il imagina les flammes brûler son globe oculaire, cautérisant la plaie en même temps qu'elles ne le défiguraient. Son corps, impuissant, s'agita au bout de la chaîne comme un poisson au bout d'un hameçon, tandis qu'un sourire pervers barra le visage du bourreau. Au bout d'une attente inimaginable, la douleur cessa enfin et seul l'icône de brûlure qui accompagnait désormais sa jauge demeurait encore.

*Ce n'est pas réel, ce n'est pas réel, ce n'est pas réel...*

Le souffle entrecoupé de sanglots, l'alchimiste fit de son mieux pour reprendre son calme tandis que sa durabilité se stabilisa dans un jaune canari inquiétant. Une main gantée le saisit par les cheveux tandis qu'il s'adaptait à son nouveau champ de vision, brouillé par la douleur mentale.

"T'en fais pas, tu ne mourras pas tout de suite. On a largement de quoi te soigner et un paquet de questions à te poser encore..." sussura-t-il dans l'oreille de l'allemand.

Romu lâcha sa prise et le corps de l'alchimiste s'écrasa sur la pierre dure, mais celui-ci le releva et l'emmena près du lac souterrain qui couvrait tout un pan de la grotte. Il maintint la tête de Lacaion à quelques centimètres de la surface claire, tandis que son supérieur se rapprocha à nouveau.

"Donne-nous les noms de tous les membres du front ainsi que leurs équipements et compétences. Est-ce que certains ont des relations particulières qu'on peut exploiter ? Est-ce qu'ils sont parfois isolés ?"

Les questions, rapides et implacables, tournèrent dans sa tête tandis qu'il avait de plus en plus de mal à aligner ses pensées.

"Je ne sais pas... Je ne les connais pas."

"Et ça se prétend informateur..."

En soupirant, Surizã se releva et recula d'un pas pour laisser le géant faire son œuvre. Il plongea impitoyablement la tête de Lacaion dans l'eau, et le força à rester immergé. D'abord calme, ce dernier commença à s'agiter tandis que de plus en plus de bulles crevaient à la surface. Les soubresauts atteignirent leur paroxysme quand les bulles cessèrent, l'eau entamant maintenant les précieux points de vie de l'alchimiste qui commençait à se noyer. Ses pieds raclèrent le sol et les ongles de sa main gauche grattèrent la pierre d'un geste frénétique et vain tandis que l'étouffement se prolongeait de manière atroce. Il serait mort depuis longtemps de l'autre côté, ou aurait au moins perdu connaissance. Ici, sa grande vitalité se retournait contre lui, prolongeant son calvaire à l'infini.

Après plusieurs minutes, on le sortit enfin de l'eau pour le laisser sur le flanc, crachotant et à peine conscient. On le força à avaler une [Potion de soin] qui annula une partie des dommages physiques qu'il avait subi, mais aucun remède ne pouvait apaiser son esprit tourmenté. A peine la fiole vide, on le replongea dans les eaux froides du lac sans même lui poser de questions cette fois. Le but était simple: briser son esprit pour le forcer à parler.

Se débattant inutilement, Lacaion se prit à vouloir que tout cela cesse. Qu'ils arrêtent de le soigner et le laissent enfin mourir, pour le libérer de cette souffrance oppressante. Il eut l'impression qu'un étau lui broya la cage thoracique, l'étouffant dans un océan de noirceur. Puis on le sortit à nouveau, le laissant évacuer le liquide étranger, avant de recommencer tout le processus. Une fois, deux fois, trois fois... Au bout de la six ou septième fois, l'alchimiste perdit connaissance pour de bon, lui octroyant un repos sans rêve et peu récupérateur.


Il ouvrit de nouveau les yeux, le menton sur la poitrine, assis sur une chaise en bois simple à laquelle il était ligoté. Il n'avait plus aucune notion d'heure ou même de jour, et seuls les bruits de mastication de son kidnappeur qui savourait toujours une pomme le tirait de son sommeil.

"On a bien cru que t'allais y passer dis donc. C'est dingue ce qu'on peut faire dans ce monde, tu ne trouves pas, monsieur l'alchimiste ?"

Il jeta le trognon par terre qui explosa, et se rapprocha dans un geste fluide presque inhumain.

"Je conçois que l'on soit parti sur une mauvaise base, toi et moi. Aussi, je te propose de reprendre depuis le début: Comment t'appelles-tu ?"

"...Lacaion"

"Bien, on progresse ! Comment s'appelle l'épéiste noir ?"

"Ki...rito"

"Allez, jamais deux sans trois, tu peux le faire: quel niveau a-t-il réellement ?"

"Je ne sais pas..."

Soupirant brusquement, Surizã sortit une petite fiole jaune et la versa de force dans la bouche de l'alchimiste qui ne savait que trop bien ce qu'était ce liquide. L'éclair jaune apparut, et son corps déjà limité se retrouva inerte. Il regarda sans rien pouvoir faire l'homme au catogan saisir son poignet et ouvrir son interface avec. Il cliqua sur "Retirer l'équipement" et le beau manteau blanc qui fit la renommée de Fuyubi disparut. Il cliqua ensuite sur "Retirer les vêtements" et laissa le corps de Lacaion en sous-vêtements simples. Il se rassit et empoigna une torche qu'il agita devant le visage effrayé de l'homme désormais pratiquement nu.

"Quelles compétences possède-t-il pour valoir plus de deux cent mille cols, tu dois bien le savoir, mmh ?"

*Valoir ? Sa tête est mise à prix..?* se demanda-t-il, inquiet.

"Non, aucune idée..."

"J'ai dis: Quelles"

La torche se colla à l'avant bras exposé de l'informateur qui gémit de nouveau.

"compétences"

La flamme remonta et posa à nouveau sa morsure glacée sur le torse imberbe de l'allemand.

"il utilise ?!"

Perdant patience, il planta férocement la torche sur son entrejambe, la brisant sous le choc. Il serra le poing et l'abattit sur la tempe du captif qui s'écroula sur le côté en poussant un grognement. Des pas précipités se dirigèrent vers la sortie, et se stoppèrent là quelques instants.

"N'espère même pas revoir la lumière du jour. Pas d'happy end pour toi, quoiqu'il arrive. Je peux te le garantir..."

Il laissa Lacaion seul, trop épuisé pour pleurer ou appeler à l'aide, sur la roche froide qui composait désormais son monde.

"...Kirito." appela-t-il faiblement avant de s'évanouir à nouveau.

Récap':

La solitude. La douleur. La peur. La faim. Toutes ces sensations rongent peu à peu mon esprit et je sens ma santé mentale décliner à toute vitesse. Les cycles de noyades, de soin, de brûlures, de coups et de questions s'enchaînèrent sans discontinuer pendant des heures, ou des jours, que sais-je. J'ai essayé de garder une horloge interne fiable en me basant sur les en-cas que faisait ce monstre, mais c'était peine perdue avec toutes mes pertes de conscience.

Quand on parle du loup d'ailleurs...Ce dernier entre à nouveau dans la cavité souterraine qui compose désormais l'intégralité de mon monde. Mais au lieu de ses piques habituelles, un simple rire résonne cette fois, un rire qui me hérisse le poil.

"On dirait que tu commences à craquer, ça n'aurait pas été si long."

Recroquevillé dans le coin le plus éloigné de l'eau, je tente vainement de tirer sur la chaîne à ma cheville, toujours enroulée autour du stalagmite centrale. Je ne peux pas lui échapper, et lui peut tout me faire... Je répète la même chose que la dernière fois, en boucle, espérant apaiser le courroux de cet homme.

"Kirito...Ayura...Shukuro...Yagi...Sneaker...Kirito..."

J'énonce cette suite de noms à voix basse, encore et encore, comme un vieux disque rayé. Mon corps se balance d'avant en arrière de façon incontrôlable, et je garde les yeux rivés dans le vide pour ne pas croiser les siens. Le chef des serpents semble satisfait et pose la main sur mon épaule, m'arrachant un gémissement tandis que je me plaque à la paroi en pierre.

"Et leurs armes ?"

Une longue plainte incontrôlée franchit mes lèvres, tandis que je serre les dents pour les garder closes en hochant la tête de droite à gauche. Mais l'homme au catogan prend lentement une torche et l'agite doucement devant moi, ravivant les douloureux souvenirs qu'elle a causé.

"...Epée...Rapière...Katana...Masse...Faux..."

La voix brisée, je fini par éclater en sanglots, comme si chaque nom d'arme m'arrachait un morceau de mon âme. Un sourire narquois se forme alors dans la pénombre, laissant apparaître une rangée de dents blanches bien rangées.

"Maintenant donne moi les infos dont tu as l'exclusivité..."

En temps normal, je n'aurait jamais divulgué ces informations dont moi seul connaissait l'existence. Certaines étaient des atouts commerciaux, et d'autres des secrets professionnels. Mais cette logique avait disparu, effacée par la torture. Un son rauque et guttural se forme dans ma gorge et je balance la tête contre le mur de pierre à plusieurs reprises en criant, préférant tenter de percer cet obstacle invulnérable que de m'enfoncer encore davantage dans la traîtrise.

Le sabreur me saisit par la nuque et me plaque au sol, m'immobilisant et rapprochant son visage à quelques centimètres du mien.

"Sinon je rassemble assez de cristaux de soin pour te maintenir sous l'eau non-stop jusqu'à demain, c'est clair ?"

Un borborygme étranglé lui répond, tandis que je tremble de tout mon être.

*Plus jamais. Froid. Oppressant. Peut plus respirer. Doit parler. Survivre.*
Pourquoi ?
*Les revoir.*
En les trahissant ?
*Si je ne le fais pas, je vais mourir.*
Si tu le fais, ils vont mourir.

Cette contradiction achève de briser le peu de conscience qu'il me reste, et mes yeux se révulsent tandis que je sombre une fois de plus dans un brouillard noir.

Ne comprenant pas ce qui venait de se passer dans la tête de son prisonnier, Surizã décida de le lancer dans l'eau jusqu'à ce qu'il reprenne conscience. Ou qu'il meure. Il était fatigué de ces interrogatoires, et tant que l'épéiste noir mordait à l'hameçon, peu importait que cet homme vive ou non. Il quitta la pièce pour retourner préparer de quoi abattre le joueur le plus fort de l'Aincrad avec ses acolytes.

*Si je reste là, je serai libre dans quelques instants... Ce serait plus facile.*

Mais une main puissante vient une nouvelle fois me refuser ce à quoi j'aspire le plus à cet instant: Romu soulève et jette négligemment mon corps frêle contre la stalagmite, avant de me regarder en croisant les bras.

"Le boss se fiche peut-être de ton sort, mais tu nous dois deux vies. Ne crois pas qu'on te laissera t'en sortir aussi facilement."

Un coup de pied fuse dans mon menton, m'envoyant au sol. Il s'avance pour resserrer ces maudits liens autour de la pierre et m'ôter toute idée de suicide dans l'étendue aqueuse avant de sortir à son tour.

Mes cris et mes pleurs résonnent dans son dos, le laissant indifférent. J'ai beau tirer sur les chaînes et me cogner la tête de toutes mes forces contre le rocher, mais rien ne vient soulager ma douleur et ma peur. Je suis seul et n'ai plus aucun droit, pas même celui de mourir. A ce rythme, je me dis que je vais finir fou avant même de donner la moindre information capitale, ce qui ne serait peut-être pas un mal...

Récap':

La zone grouille de Rainbow Sparrow et d'Equidaxe, mais rien de très dangereux pour moi maintenant. Accroupie derrière un arbre, je guette l'entrée du réseau souterrain dans lequel ces PKs ont emmené Fuyubi.

Celui qui est à l'origine des feux d'artifices et que je veux rencontrer depuis cette nuit-là pour lui demander comment en fabriquer s'est fait sauvagement attaqué avant-hier soir. Et maintenant me voilà là, à faire le pied de grue pour un inconnu. Mais je suis persuadée que quelqu'un capable de faire autant pour les gens ici ne peut pas être mauvais. Ce sont donc forcément eux les méchants!

J'avais été choquée de reconnaître une des voix parmi les 4 kidnappeurs, la même que celle qui m'a interpellé alors que j'admirais tranquillement le spectacle de cette soirée. Dire que j'aurai pu les arrêter avant! Enfin, façon de dire... J'étais bien moins forte que maintenant, et ils étaient 6 à ce moment-là.

En quasiment deux jours de surveillance, seuls quatre hommes sont passés par l'entrée de la caverne. Aucun signe des deux derniers cela dit... Soit ils sont morts, soit ils sont sur une autre mission. Mais seule et dans leur repaire, c'est pratiquement du suicide...

Je me ronge un ongle en tiquant, tout en me dirigeant vers l'escalier pour redescendre vers l'étage 6. J'ai peut-être raté un indice important sur la scène du crime... Et ya bien quelqu'un qui va s'inquiéter de sa disparition, non? Je pourrai au moins transmettre les infos que j'ai ou en motiver certains pour un sauvetage... Non, faut pas rêver. Ils ne croiront même pas ce que je dis, avec mon satané curseur.

Je soupire lentement, fatiguée de cette injustice. Ma dernière chance reste d'attendre chez lui qu'un de ses amis se pointe et espérer qu'il me croit sur parole... C'est pas gagné.

Dégainant ma faux pour la poser sur mon épaule, j'étire mon cou de chaque côté pour le voyage retour qui promet d'être long... Dommage que les cristaux de téléportation soient si rares et chers. Mais le temps presse, et j'active Sprint pour tenter d'abréger au maximum les souffrances de cet homme que je ne connais encore que via son surnom. Peut-être m'offrira-t-il des infos intéressantes en remerciements! Motivée à cette idée, je souris et charge le premier groupe de monstres qui me barrent la route.

Salut Laca-chan! Voici ton évaluation  !

Nombre de ligne : 2/2
Qualité de la langue : 2/2
Avancement du RP : 1/1
Soit 5/5 ! GG!

Pseudo : Lacaion
Nombre de messages : 4
Cols gagnés : 644 cols
Cols dépensés : /
Objets utilisés : /
Objets obtenus : /
Compétences gagnant des points : Ecoute x1 / Armure x3 / Dague x1 / Parade x1
Niveau début du rp : 61
Niveau(x) gagné(s) : +1
Réputation : ¤ 1 - 1
Remarques :Ce rp m'a donné des frissons. L'ambiance est vraiment gérée, j'avais l'impression d'y être (et c'était absolument terrible). Plus j'avançais dans la lecture, et plus mon kokoro en prenait des coups x) Bravo à toi, tu m'as vraiment tenue en haleine et maintenant, je n'a plus qu'une envie : que quelqu'un vienne sauver ce pauvre Lacaion qui ne méritait clairement pas ça ! (*pleure*)
On espère qu'il ne va pas être trop traumatisé mais... Je pense qu'il va pas beaucoup apprécier les douches et les bains pendant un certain temps...

~Ayura~