Le 11 avril, palier 8, 6h40

Le réveil sonna alors que j’étais déjà réveillée, contemplant le plafond depuis quelques minutes. Je l’éteignis tranquillement avant de me lever du bon pied, soudainement dynamique et enjouée. J’avais vite fait pensé à la journée d’aujourd’hui hier soir et mes préméditations semblaient réalisables, et seraient même hyper drôles si elles fonctionnaient. Trottinant gaiement dans la pièce de mon auberge préférée du huitième étage, j’ouvris rapidement mon inventaire pour m’habiller de cinq gestes manuels rendus plus qu’automatiques par l’habitude. Mes membres nus pixélisés furent immédiatement recouverts par un tissu permettant des mouvements rapides sans aucune gêne et je me sentis un tout petit peu grandir grâce aux chaussures apparues. J’avais peu dormi à cause de toute l’élaboration de mon projet mais au moins, celui-ci s’avérait tout sauf bancal ! Les questions posées aux PNJ’s les derniers soirs n’avaient pas été vaines et c’était grâce à elles que mon recueil d’informations me permettait d’être aussi sûre de moi. Allez, seizième étage, tu es à moi !

« Mowahahaha ! »

Les poings en l’air, je jetai un coup d’œil à ma tronche avant de sautiller jusqu’à la porte de sortie et de retrouver mon visage stoïque. Aujourd’hui, j’allais avancer dans la vie. Aujourd’hui, j’allais être riche !!!


 

Ça faisait longtemps que j'avais choisi cette compétence mais… Je l'avais pas souvent utilisée en vrai. Je connaissais même pas ses points forts, ses points faibles ou ses limites. En ce qui concernait mes autres capacités, savoir ça coulait carrément de source. Pour l'arme, seules mon agilité et ma logique physiques comptaient réellement. La limite se trouvait seulement dans les bonus donnables au Marteau, ce qui, sachant qu’il y avait que vingt étages accessibles, ne me gênait pas pour le moment. Pour Analyse, son niveau et son mode d'activation pesaient, pour régénération c’était le temps qu'elle mettait pour être efficace qui m'embêtait… Fallait vraiment lui augmenter son niveau à celle-là ! Elle serait hyper pratique au long terme. Quoique… J’aurais peut-être mieux fait de choisir la Récupération d'urgence ? La première n’était utile que lorsque la situation était calme tandis que la seconde était vitale quand il pleuvait de la mouise. Bah.  De toute façon, ce qui était fait était fait, j'y pouvais plus rien alors pourquoi y penser, hein ?! Bref. Quant à Armure, la seule chose chiante se trouvait dans les One shot. En effet, je pouvais détruire tranquillou les monstres des premiers étages maintenant. Or, fallait que ceux-ci me frappassent pour que ma compétence se retrouvât boostée. Sachant que j’étais loin d’être patiente et que j’étais pas masochiste (du moins, pour l'instant), c'était pas contre des bisounours tout faiblards qu'Armure allait se voir améliorée… Pis, y avait ma compétence préférée, Acrobatie, que j'avais pas besoin de détailler. Enfin, concernant Crochetage, à part dans le labyrinthe super cool que j'avais exploré avec le gamin au beau manteau, j'avais pas eu à l'utiliser souvent... Ce qui était rageant quand même ! Une voleuse sans coffre dans SAO, c’était une voleuse fauchée quoi.

Mais ici, d’après mes sources, y avait des pirates de partout ! Et qui disait pirates disait trésors ! Huh huh huh !! Pis j'avais seulement douze niveaux de plus et ces pirates se promenaient généralement grâce à un bateau avec un grand équipage ! Ils allaient donc pouvoir bien me frapper nan ? Fais-moi mal Jiro, Jiro, Jiro, envoie-moi au ciiiel, zou !!- fais-moi mal Jiro, Jiro, Jiro, moi j'aime l'amour qui fait boum ♫ ! En vrai, j'allais pouvoir tout améliorer ici. J'aurais juste à trouver une flotte, utiliser Dissimulation avant qu'elle se rapprochât de mon propre navire, monter dessus en laissant les PNJ’s se faire dégommer puis me balader jusqu’à la pièce aux trésors ! Ici, je buterais les gardes, j'ouvrirais avec crochetage la porte sans doute fermée à clé ainsi que les coffres… S’il y en avait ? Peut-être que les pirates gardaient tout leur pognon sur le sol pour pouvoir nager dedans ? Je ferais ça à leur place en tout cas ! Je fixai l’horizon, excitée, et me dirigeai vers le bord de l'île que j'avais bizarrement réussi à trouver facilement. Un bateau, des PNJ's à protéger et à moi la richesse !!

« Je veux me balader. Je vous protégerai sur le chemin. »

Oh le gros pipo !  Devant le capitaine modeste et ses larbins, j’étais en train de négocier ma place sur leur bateau afin de visiter l’étage sur la mer. Ils étaient peu, ils étaient non jouables et ils semblaient pauvres, mais tellement pauvres ! Et, tout le monde le savait, c’était les plus démunis qui étaient les plus cléments et qui faisaient jamais payer. Sans compter qu'ils semblaient extrêmement faibles avec leur corps maigre et leurs joues creusées, ça m’aidait. J'avais complètement oublié de demander si le voyage sur l'eau était payant, la mention des pirates et l'insinuation de leurs trésors par milliers ayant accaparé toute mon attention. En tout cas, j’étais à la première étape de mon plan et fallait l'avouer, j’étais assez excitée, si bien que mes yeux brillaient. Pour sûr, il n'y aurait pas que des pirates comme méchants à croiser mais je me pensais assez forte et surtout assez bien équipée pour me mesurer contre les bêtes bizarres qui hantaient ces lieux. J'imaginais déjà qu'il y aurait des sirènes ou des gros poissons, c’était la base dans un niveau dans ce genre.

Peut-être un gros poulpe bien sale et rare, comme dans les mangas ? J'aimais bien ces trucs, ils étaient hyper bons en bouche, sa mère ! Ça me rappelle que ça fait mille ans que j'ai mangé des takoyakis… ooh… takoyakis… Alors que le marin en chef acceptait ma présence sur son minuscule bateau tout pourri, je commençai à baver en me remémorant ce plat génial. J'en bouffais souvent, il n’empêchait ! J’étais assez gaga de ça, c’était comme avec les beignets de crabe, les sushis et les makis : je les aimais en statut d'offrandes. Leur texture était gluante et caoutchouteuse et qu’est-ce que j’appréciais les écraser avec mes molaires… J'adorais aussi sentir les petites boules sous leurs tentacules avec le bout de ma langue et leur goût !- ce goût !! Bordel… Pourquoi je pensais à ça, je me faisais du mal !! D'un coup, ma mère s’immisça dans mon esprit, accompagnée de l'odeur de ses repas. Puis mes sœurs apparurent à leur tour, rapidement suivies de mon père. J'avais failli oublier qu'on mangeait tous ensemble avant et que chacun racontait sa journée dans ses détails… et qu’à chaque débat un peu débile (mais intéressant pour moi) que je lançais, personne ne répondait. Et que je jalousais ma petite sœur qui, faute de se faire ignorer comme ma personne, se faisait engueuler pour ses actes aussi idiots qu'irresponsables.

D’où le « vaut mieux se faire disputer que se prendre des vents ». Bref. J’avais pas attendu mille ans pour lever une jambe et sauter dans mon incroyable paquebot minable. S’il n’y avait pas eu une petite porte à moitié fermée laissant entrevoir un minuscule escalier, je l’aurais presque comparé à une barque qui fonctionnait à la force des bras des marins grâce à des pagaies. Tout ça me rappela une nouvelle fois mon père et son amour pour les bateaux et la pêche. En vrai, j’avais jamais eu de bol avec les navires, dans la réalité : à chaque fois que j’étais présente, y avait toujours un problème. Le moteur était foutu, les ampoules étaient foutues, la batterie était foutue, le réservoir d’essence était soudainement vide… En même temps, avec les revenus modestes de mes parents, on pouvait pas acheter de la qualité !! Mais le plus bizarre, c’était que tous ces soucis se présentaient vraiment que quand j’étais là. Dès que j’étais absente, mes sœurs, mes parents et les invités pouvaient aller pêcher et bronzer tranquillement sur le bateau !!

Calme ta joie, ça pourra pas arriver ici, n’est-ce pas ? Ça devait bien faire vingt minutes que nous avions quitté la côte et que nous bougions, tout doucement. Je n’avais fait que contempler l’horizon, un côté de ma tête perdu dans ses pensées, l’autre à l’affut : où étaient ces pirates ?! L’odeur salée m’avait pas aidée à me débarrasser de tous mes souvenirs mais… Je repris mes esprits en sursaut, interpellée par ces gros cris familiers.

« Ces bruits… Des mouettes ? »

Retournée, je pus remarquer que les marins maigres semblaient complètement chamboulés et qu'ils couraient dans tous les sens alors. J’empoignai mon Marteau à la hâte en Analysant les monstres volant dans le ciel. Ah bêh, j’allais pouvoir me les faire tranquillou ceux-là ! Après avoir crié aux PNJ que je m’en occupais et qu’ils devaient se mettre à l’abri, j’attendis que les oiseaux se missent à l’attaque, les jambes fléchies et le Marteau en l’air. Les pirates, ce sera pour plus tard.

Je les narguai pour les attirer, et ces monstres débiles ne se firent pas prier. Ils avaient tous attaqué d'un coup, me visant avec leur bec, se propulsant grâce à leurs ailes. Mais ils restaient moins rapides que moi : un petit pas sur le côté me permit d'en laisser trois attaquer le plancher du navire pour récolter le même nombre de coups sur les épaules et le nez. Pas mauvais viseurs, ces oiseaux ! Il n'empêchait que je venais d'en abattre un et que son cri m'avait arraché un sourire incontrôlable. Je haïssais les mouettes. Comme disait ma mère, c'était de la charogne, pire que des hyènes ! Et qui disait hyène insinuait Lycaon. Et qu'est-ce que je faisais aux Lycaons ?

« J'leur pète leur sale face de mes deux ! »

Ces parole étaient surtout pour moi, mais je vis un des marins maladroitement caché en face de moi hocher la tête. Je faillis me mettre à rire mais le « sol » ainsi attaqué venait de me donner une décharge électrique. Bordel, c'est vrai qu'cette barque est toute pourrite ! Moi qui pensais qu'il fallait la considérer comme un Immortal Object, il était en fait plus logique qu'elle fût tuable, tout comme ces PNJ's d'ailleurs. Mince, fallait vraiment faire gaffe à eux en fait, au moins avant de trouver ces pirates... Enfin... Non en fait, même après et pendant ! J'allais faire comment pour rentrer sans eux moi ? Si j'avais pas de bateau et pas de navigateur, j'allais pas réussir à sortir d'ici !! Le bateau des pirates? Que dalle, les autres allaient vouloir, ou plutôt tenter de le couler pis, j'y connaissais que dalle à la navigation moi !! Je détruisis d'un coup sur son dos fin, la seule des deux mouettes qui s'étaient prises le bois dans la tronche, son bec coincé dans un défaut naturel du canoë dégueulasse. Sans même regarder ma jauge de vie toujours bien pleine, je me concentrai sur mes quatre autres ennemies, qui avaient eu le temps de reprendre leur envol afin de tomber de nouveau dangereusement sur moi. J'attendis le bon moment afin de donner un coup circulaire qui tua ma première cible, réduisit la jauge de la deuxième et dévia la trajectoire de la troisième qui faillit terminer dans l'eau. Heureusement, le bec de la dernière mouette alla se ficher violemment sur mon pied droit, celui-ci semblant assez épais pour ne pas être transpercé : une victoire, le bateau n'avait pas pris cher, et il ne prendrait d'ailleurs plus aucun dégât... Bien que je ne susse (bordel, cette conjugaison, j'aime !) ce qu'il avait vraiment pris. Je profitai de cet instant pour abaisser sèchement mon Marteau sur ma courageuse assaillante avant d'attendre que les deux derniers monstres se remissent à voler pour s'abattre à nouveau sur ma frimousse trop mignonne ! Jette-toi des fleurs va! Des fleurs ici ? Plutôt de la flotte ! Le premier partit en éclat avant même de me frôler, la vitesse du second fut réduite à néant quand son bec se coinça entre mon sein et mon bras gauches. Plus qu'à le jeter devant moi pour faire s'embrasser ses ailes et mon arme et c'était bouclé !

Légèrement essoufflée, autant par ma petite frayeur concernant ma flotte fragile que par mon activité physique, je criai aux marins que c'était terminé, demandant au passage si personne avait quelque chose de cassé. C'était assez embêtant pour la suite de cette journée en tout cas... Peut-être que ça allait vraiment faire comme dans la réalité et que le bateau allait finir par s'arrêter dans un coin paumé, par manque de... Je ne savais quoi. Plutôt par trop de présence de Rikka ouais! Tch. J'aurais plutôt dû choisir un meilleur équipage et un gros paquebot ! J'aurais sans doute été accompagnée d'autres joueurs cela dit et ça aurait eu son avantage : ils auraient pu rester avec les marins pour protéger le bateau et ces derniers pendant que j'aurais parcouru l'antre des pirates ! Mais il était trop tard pour changer d'avis et y avait un risque de devoir payer les navires de luxe aussi ! Surtout, j'avais pas de thune à donner à quiconque ! Il m'en fallait pour... Pour... Une meilleure arme ? Une maison ? Oui, une maison, va pour cette excuse.

Après un quart d'heure de surplace et de contage inutile de peur, mes marins se décidèrent ENFIN à continuer notre route, la barque luttant contre les vagues et les courants. Franchement, la mer était plutôt calme et pourtant, je ressentais quelques secousses. J'avais vraiment peur pour l'état et l'avenir de ce navire... D'accord, il renaîtrait juste après sa destruction à la première ville de l'étage mais bon... Je serais sans doute bloquée sans lui quoi. Et je nageais pas bien... Il se passa environ dix minutes avant que j'entendisse de nouveau un cri de marin.

Bon ben... Encore des mouettes. Et je leur laissai pas le temps de s'abattre sur mon canoë ! D'un pas plus ou moins élégant, je sautai sur le minuscule bord du bateau, le prenant pour appui pour bondir à nouveau vers mes assaillants. Le premier animal tomba d'un coup, mon arme et son bec se rencontrèrent et l'un des deux explosa en mille morceaux. Evidemment, pas besoin de préciser lequel ! Quant à l'autre oiseau, après avoir vu ce spectacle horrible, il ne fit que crier et me regarder de haut (dans tous les sens du terme). Et alors que j'allais l'ignorer, le prenant pour un lâche qui allait vite fuir, mon nez disparut d'un coup, parfaitement tranché par le piqué ravageur d'une mouette que j'avais pas remarquée. Bien entendu, ce fut mon moment de surprise qui décida Mouette n°2 à m'attaquer dans le dos, dressant une fine ligne rouge artistique dans mon dos, invisible par ma personne.

Ah bêh, avec mon look à la Voldy, j'allais faire peur à mes marins !! Grâce à mon temps de réaction accru par l'expérience, j'envoyai valdinguer d'un coup bien violent la lâche en me retournant brutalement, heureuse d'avoir sauvé le bateau. Malheureusement, la mouette Surprise avait dû le taper de plein fouet, mais le bébé était toujours bien en vie ! Interpellée par la couleur orange de la jauge de vie de la dernière mouette (oui, j'avais vérifié le ciel lorsqu'elle y était remontée, m'assurant qu'aucune autre m'avait prise comme cible), je me dis que quelqu'un était déjà passé par là. Sans doute un joueur mort à présent ! Je mis très vite cette pensée de côté, bondissant à nouveau, prenant pour appui le bord puis le petit muret qui protégeait la cage d'escalier minable du canoë. Je parvins très vite à la hauteur de l'attaquante et l'écrasai d'un coup verticale, faisant couler les pixels triangulaires du cadavre. Ça dégage !

Finissant mon bond les fesses sur le sol à cause de mon peu de points accordés à Acrobatie, je soupirai avant d'aller chercher mes marins cachés, tremblants de peur. J'avais toujours aimé jouer à cache-cache mais j'étais bien la seule ! L'unique fois où on y avait joué en famille, c'était parce que ma grande sœur voulait aller à la piscine avec ses potes sans ma petite sœur et moi. Bien entendu, cette dernière et moi-même devions nous cacher... Et moi qui pensais que j'avais vraiment été hyper balèze pour que ma grande sœur et ses amies m'eussent pas découverte durant tout l'après-midi ! Les gens plus âgés que moi étaient juste affreux et cruels !!

"Hein ?"

Pouh !!- j'avais esquivé de justesse, rentrant mon ventre d'un coup, chutant de façon voulue à temps. Un peu plus et je me faisais transpercer par cette immense fourchette !! Levant la tête, je pus détailler le haut du nouveau monstre : un bouclier rose corail trop girly. Nan, sérieusement, je fis plusieurs cabrioles en arrière afin d'avoir le temps de l'Analyser et je réussis à voir une partie du visage humain de mon attaquant... Qui se laissa tomber dans l'eau en lâchant d'un coup le bord. Boudiou, c'était flippant ! Moi qui pensais qu'il y aurait surtout des sirènes trop sexy à moitié dénudées, je me retrouvais avec un mâle super viril qui possédait des cheveux plus longs que les miens ! Un jour, j'aurais le courage de les faire pousser, je le jurai ! Je me levai d'un coup et regardai tout autour de moi. Heureusement, mes marins avaient eu la jugeote de prendre les escaliers, préparés à se mettre à l'abri grâce à l'événement précédent. J'avais donc tout le pont pour moi.

Le monstre marin avait dû prendre mon bateau comme cible, j'imaginais donc qu'il allait revenir prendre de nouveau le bord dans une main pour m'attaquer avec l'autre. Mais par d'où allait-il apparaître ? A gauche, à droite, devant ou derrière moi ? A moins qu'il préférait les diagonales, comme moi ? Je me tins prête, jambes toujours fléchies, marteau bien levé. Mais alors que le tension était à son comble, une voix forte s'éleva et me fit sursauter comme jamais je n'avais sursauté jusqu'alors.

"Hééé !! J'ai dû quitter mon bateau et j'ai plus trop de pv ! Vous pouvez me remonter ?"

Oh le con ! Mes mains sur le bord du navire, je posai rapidement mes yeux sur l'imbécile à l'eau. Dérivant et criant les doigts en l'air, il me sourit comme un crétin lorsqu'il me remarqua et parla de plus belle, excité. Avec son bandana tombant et son visage enfantin joufflu, je fus même surprise qu'il eût eu l'intelligence de rester armé. Mais je ne pus m'interroger plus sur cet abruti, je voyais une forme noire s'avancer dangereusement de lui sous l'eau et je n'eus même pas le temps de réfléchir à quoi faire. La jauge de l'idiot était dans le jaune, je connaissais pas ses statistiques et il était certain que l'Homme-Triton n'allait pas y aller mollo avec ses super chiffres caractéristiques. Enfin, je disais chiffre, mais à son niveau, on parlait plutôt de nombre ! Je venais seulement de me rendre compte qu'on était en réalité dans la cour des grands dans cet étage...

Pas une ni deux, j'avais une nouvelle fois sauté mais cette fois-ci hors du bateau, mettant in extremis mes pieds sur la coque de ce dernier afin de me propulser très très maladroitement sur la forme noire qui venait juste de se dresser devant le joueur insouciant, arme préparée. Celle-ci bombarda le crâne du chevelu, une fois, deux fois et le laissa ainsi exploser en des centaines de pixels bleutés. Moi qui pensais que j'allais finir embrochée et rester ainsi dans les airs, j'avais finalement été plus rapide et avais pu attaquer deux fois d'affilée...! Comme quoi, la vitesse, fallait vraiment l'augmenter, ça pouvait sauver une vie ! Bref, j'avais oublié le "plouf !". Un petit plat pour la demoiselle, un ! Heureusement que j'avais gardé mon marteau en main sinon, j'aurais été bien emmerdée... Mais alors que je remontais vers la surface, une main m'attrapa pour me délivrer de l'eau plus rapidement.

"Impressionnante, t'as été carrément impressionnante ! Bon... Même si t'as failli te taper un premier plat en te ruant sur le monstre, haha. Merci, j'ai tellement eu de bol de tomber sur... Ah, mais t'as gagné un niveau ! Bravo !! On remonte ?"

Mon regard glacial ne réussit pas à dégager son sourire d'imbécile heureux de son visage. Je mis de côté la fenêtre de l'augmentation du niveau pour retrouver le "sol". Nageant lentement, très lentement et difficilement vers le canoë, je me rendis une nouvelle fois compte de la puissance de l'intelligence de Kayaba. L'eau était fraîche et m'avait réveillée d'un coup lorsque je l'avais pénétrée. Et son goût était bel et bien salé. C'était...

"Impressionnant, vraiment !"

Si seulement il pouvait se la fermer celui-là ! Regardant tout autour de nous, je lui fis signe de monter avant moi. D'autres monstres pouvaient surgir. En tout cas, j'avais vraiment été hyper sympa, j'en revenais pas. En même temps, si j'avais pas fait ça, peut-être que les PNJ's l'auraient mal pris ou un truc du genre ? Qui pouvait savoir ce qui avait été inscrit dans ces codes... Pis, être accusée de non-assistance à personne en danger, c'était très peu pour...

"Huh huh... Tu vas m'être utile toi..."

Je réussis après plusieurs tentatives à monter après lui suite à mon chuchotement mutin. Aah, j'étais vraiment mauvaise en réalité, mon inconscient avait dû penser à ça à l'avance, c'était obligé !

"Encore merci, avec tous ces pirates, j'ai eu vraiment du mal ! Il en sortait de partout, je pouvais rien faire ! J'ai dû me jeter à l'eau après leur attaque du navire et abandonner mes PN..."
"T'as croisé un bateau de pirates alors. C'était par où ?"
"Juste à côté. Il faudrait donc partir pour ne pas..."
"Parfait, on y va !"
"Hein ?!"
"Avale une potion, guide les marins et quand on sera assez près mais pas trop pour pas être vus, tu m'attendras."
"Attends, attends, t'es complètement folle ! Il y en a plein dedans !! J'ai pu en avoir que deux, t'imagines un peu ?! Deux !"
"Avec un peu de chance, ils sont encore en train de fouiller le bateau ou de tuer les PNJ's, faut s'magner."
"Mais t'es...!"
"Impressionnante, je sais. On y va ?"

Il capitula et on retrouva bien vite les deux bateaux. Si le premier était plus grand que le mien, il était carrément microscopique à côté de l'énorme navire de pirates. Au-dessus volaient fièrement trois autres mouettes aux jauges à moitié vides... Peut-être que les trois précédentes que j'avais dû battre avaient été d'abord les assaillantes de mon invité ? Bah, je le lui demanderais pas pour le savoir. Navire arrêtée, ancre jetée, je fis un dernier signe au joueur et à mes PNJ's.

"Oubliez pas : s'ils s'approchent, éloignez-vous de quelques mètres. Je serai peut-être longue. Toi. Je t'ai sauvé la vie. Si tu me la fais à l'envers, je te retrouverai."

J'avais bien pris soin de vérifier son nom et de lui donner le mien grâce à un mp et à une demande d'ami provisoire. Je pourrais ainsi lui dire de partir ou de m'attendre selon les événements... Et il pourrait savoir si je suis encore en vie aussi. On savait jamais ! Mais y a plus important que ça : à moi les trésors !!! Je sautai et abandonnai mon canoë.

Qu'eeest-ce que c'est chiant ! J'aurais peut-être dû choisir Nage au lieu d'Acrobatie. Dans cette situation et ce monde, le poids de mon corps était horriblement lourd à porter et la poussée d'Archimède semblait me narguer en faisant l'absente. Grognasse ! J'étais encore loin des deux bateaux mais grâce à ma petite taille et à la leur plus grande, je pouvais avancer sans mettre ma tête sous l'eau pour éviter que les quelques personnages ennemis observateurs ne me remarquassent. C'était un point positif car, au moins, je perdrais pas de point de vie avant d'arriver et de me faire taper par eux. Je continuai de nager lentement, fidèle à mon style grand-mère, fidèle à la brasse !


Noon ! Garde ta main accrochée à ce truc, ne tombe pas, ne bouge pas, ne fais qu'un avec le bord de ce bateau d'mes deux ! J'avais réussi tant bien que mal à atteindre enfin le petit navire (ohé ohé matelos !) et avais entrepris de le monter pour faire d'une pierre deux coups et pouvoir grimper plus facilement sur le bateau pirate juste à côté mais... Il peut pas te voir, il peut pas te voir, il te voit pas ! Il s'était avéré que plusieurs bandits étaient encore sur le bateau du joueur échoué et que l'un d'entre eux m'avait fait une frayeur. Ayant dû sentir ma présence, il s'était penché et regardait à présent l'eau juste en-dessous de moi, méfiant et sceptique avec son arme levée. Heureusement que j'avais eu précedemment la jugeote d'ouvrir le menu pour pouvoir utiliser Dissimuation à n'importe quel moment !! Collée serrée à la coque de la flotte, je faisais de mon mieux pour rester immobile, mes petits doigts s'accrochant autant qu'ils le pouvaient au bord large du pont. Encore quelques secondes à trembler mentalement pis le pirate s'en alla enfin et je pus expirer d'un coup, mettant fin à la compétence.

Levant un tout petit peu la tête, de sorte à pouvoir jeter un coup d’œil sur le "sol", je réactivai la capacité. J'avais eu le temps d'en voir deux avant qu'ils descendissent les escaliers. D'autres pouvaient se trouver en-dessous... Mais avant que je réfléchisse plus en détail et que je sautasse sur le pont, le cri des mouettes aux jauges de vie entamée parvint à mes oreilles, me faisant sursauter de surprise, me rendant de nouveau bien visible. Et cette fois-ci, elles m'avaient vue ces garces... Je réussis à esquiver l'attaque d'une des trois en faisant un haut saut, me permettant de grimper sur le bord. D'un coup rapide et précis, j'écrasai les ailes d'une des charognes avec hargne, la laissant exploser sans ciller. Sachant que les piaillements ramèneraient des curieux, je me cachai derrière un baril tandis que les oiseaux reprenaient leurs esprits et leur élan aérien. J'utilisai de nouveau Dissimulation pour les laisser bêtes, cherchant de leurs minuscules yeux rouges ma personne. Pensant au bout d'un moment que les pirates de l'autre bateau avaient dû se détourner des piailleuses, je montrai de nouveau le bout de mon nez. Sautant encore une fois maladroitement, je m'éclatai par terre avant d'avoir pu toucher l'une des deux dernières bêtes plumées. Elles attaquèrent sans pitié mais je réussis à en toucher une en plein dans le bec à temps ! La dernière ne mit pas longtemps à finir projetée sur le ponton, ses os éclatés par le poids et la vitesse du Marteau Cramoisi. Sans même prendre le temps d'admirer son cadavre pixelisé, je descendis les marches à la hâte. Les pirates à l'intérieur étaient à ma merci, dans cet endroit clos sous le pont, dans le bateau. Ils ne le savaient pas encore mais ils étaient déjà morts.

Je pensais pas l'intérieur du bateau aussi sombre et aussi glauque ! Les portes des cabines étaient toutes entrouvertes, des trucs divers et variés traînaient sur le plancher et il régnait un climat plein de tension. Peut-être qu'à chaque fois que des pirates pénétraient et faisaient leur un navire, ce dernier voyait son apparence et son atmosphère transformées ? C'était carrément probable. Entendant du bruit plus au fond, je souris en faisant tourner mon marteau par automatisme. J'allais me les faire mais d'abord... J'envoyai un message de menace à mon guet (je ferai pas le jeu de mots, ce serait trop facile, voire lassant) pour lui filer encore plus les chocottes et lui faire savoir que je l'oublierais pas. Ce qui était carrément vrai. S'il me lâchait, je le lui ferais bien bien biiien payer. Il deviendrait mon esclave, je profiterais de lui jusqu'à ce qu'il crevât de fatigue, même ici ! Dans la réalité et grâce aux animés, j'avais appris quelques techniques de manipulation et de torture mentales, je pourrais donc pas le louper ! Annonce envoyée accompagnée de la consigne "réponds pas" pour ne pas que le bruit du message reçu me trahît, je gardai mon menu ouvert pour préparer mes arrières. Et je fis bien de penser à ces dernières, bien que cette attention fût portée trop tard.

Un gros coup de hache dans le dos m'arracha un cri de surprise et me laissa à moitié pliée en deux pendant une seconde de trop. La hache m'avait déjà entaillée une deuxième fois, si sèchement que je crus que mon bras allait finir détaché de mon tronc. Mais nous étions dans un jeu et mes statistiques étaient carrément supérieures à celles de mon ennemi, un mouvement de l'index et Analyse me l'avaient confirmé. Reprenant mon sang-froid, détruisant ma confusion, ignorant les pixels rouges s'étant ajoutés à ceux ayant déjà transpercé ma peau virtuelle, je lui fis embrasser mon Marteau. Et ce roulage de pelle intense et cinglant se termina en drame, en une tragédie provoquée par la mort d'un des personnages ! Me retournant vers la porte d'où provenait le bruit encore plus fort que tout à l'heure, je me mis en posture défensive. Deux pirates étaient sortis en grognant, les deux possédant une épée. Ah mer... Credi. Mes jeux préférés de la réalité me l'avaient bien appris : contre une arme blanche, un marteau avait toujours le désavantage !

"Mais franchement, dans Sword Art Online, on s'en balance de ça !"

J'avais jamais entendu de triangle par ici après tout ! Une nouvelle utilisation d'Analyse me permit de savoir que les descriptions des pirates épéistes étaient les mêmes que celui du pirate bûcheron. Avec un énième sourire, je m'élançai sur celui de droite, que je dégommai en un coup bien porter sur l'oreille. Ah bêh, dans la réalité, il serait tombé et aurait eu mal, mais tellement mal !! On m'avait déjà foutu une droite dans l'oreille, j'avais terminée plus sourde qu'avant et chamboulée par des vertiges pour la fin de la journée. Alors un coup de marteau donné à cette vitesse, j'osais même pas imaginer... Le second ennemi s'occupa de mon épaule tandis que je chargeais à nouveau, prenant appui sur ma jambe dominante, tendant mon bras menaçant vers son entrejambe mal habillée. Il termina sa triste vie de code aguerri comme ses confrères : en semoule bleue brillante et voltigeante.


Un rapide et prudent tour du navire des marins de mon joueur esclave m'avait permis de le confirmer : s'attarder ici ne servait plus à rien. C'était maintenant le tour du plus gros. C'était maintenant le tour du Bateau des Pirates.

Merci à Acrobatie pour m'avoir permis de faire un "immense" bond afin de m'acquitter de presque la moitié de l'escalade à faire pour atteindre le sol du navire ! Heureusement que les gros bateaux super hyper balèzes étaient bien faits, de sorte à ce que chacun pût s'accrocher à tout et n'importe quoi pour rester dessus et grimper... Sinon, j'aurais été vraiment complètement foutue. J'avais eu le temps de m'accrocher et de galérer à monter pendant à peine trois minutes avant d'entendre un gros BOUM et de voir le navire de mon esclave temporaire exploser comme une vulgaire boîte de cornichons tombant quelques mètres avant le frigo (oui, c'était du vécu). Ah bêh, si j'avais réfléchi un peu plus longtemps pour savoir comment m'y prendre pour attaquer discrètement les pirates, j'aurais volé ainsi, transformée en des milliers de paillettes girly.

Mais je m'attardai pas sur cette vision et continuai de monter en faisant bien attention à regarder au-dessus de moi, gardant ouvert mon menu pour utiliser à n'importe quel moment Dissimulation. Si un seul pirate me voyait et prévenait ma présence aux autres, j'étais fichue. Car, si j'avais bien compris, ils avaient tous des armes différentes ; et je savais grâce à mon expérience et surtout à d'autres monstres rencontrés, que les mobs étaient permis d'attaquer à distance. Ce qui n'était pas le cas des joueurs... Si jamais ils me jetaient des lances ou ces grosses boules à pics dont je ne connaissais le nom, j'étais morte. Pourquoi on avait pas le droit à ça d'ailleurs ?! S'il y avait eu des flingues, je les aurais sans aucun doute choisis... Quoique... Non, j'étais partie dans l'optique d'essayer tout ce que j'avais jamais tenté lors de ma connexion.

Bref, je chassai cette divagation d'un coup d'index sur ma compétence de dissimulation. J'avais cru entendre quelque chose au-dessus et m'étais hâtée pour me cacher. Toute collée contre la paroi du navire et immobile comme on ne pouvait pas plus l'être, je guettais le moindre mouvement, le moindre son trahissant l'approche d'un monstre quelconque. Je patientai ainsi pendant cinq minutes avant de me reprendre, serrant les fesses. Le bateau s'était remis en marche d'un coup, me faisant flipper comme une malade. J'me souvenais pas avoir dit aux autres nuls qu'il fallait suivre comme s'éloigner si le navire partait ou s'approchait... Argh !- j'allais p't-être être dans la mouise juste à cause d'une petite phrase oubliée !! Le pire, c'était que j'savais même pas où j'les avais laissés !!!

Je soupirai, me calmai et essuyai la sueur inexistante de mon front avec mon avant-bras avant de continuer à grimper, me dirigeant toujours vers ce que je pensais être et que je considérais comme l'avant du bateau. Si mes quelques connaissances sur le sujet n'étaient pas des conneries, y avait jamais beaucoup de gens près du volant. Pis, avec un peu de chance, la vie des pirates était rythmée et ils mangeaient à heure fixe ? Il était presque midi après tout... Arrivée tout en haut, je risquai un coup d'oeil tout en utilisant une nouvelle fois Dissimulation ainsi qu'Analyse pour déceler tous les monstres se trouvant par ici. Il se trouva que deux méchants pirates se promenaient autour de ce guidon tandis qu'un seul avec un petit chapeau avait ce dernier entre les mains. Le super couvre-chef n'était-il là que pour le style ? ... ... ... Mais en fait... Faut pas se réserver le capitaine pour la fin ?! C'était toujours comme ça dans les jeux vidéo : le big boss à la fin.

"Mais qui a dit que j'étais un personnage lambda qui suivait les bases des rpg ?"

Mon marteau lui explosa sa tronche de pouilleux aux vêtements bourgeois d'un coup plus violent que je l'avais souhaité, après un bon disgracieux qui me permit de me retrouver derrière lui. Grâce à la surprise des deux autres, je pus les empêcher de parler et d'alerter les autres, transformant le premier en un amas scintillant de pixel, faisant tomber l'autre à la renverse grâce à une attaque circulaire. Il ne put répliquer qu'une fois avec sa minuscule dague : mon marteau l'obligea brutalement à rentrer le ventre et il disparut comme son confrère. Bon... Fallait trouver un moyen de passer les escaliers menant à la salle aux trésors maintenant.

Mais j’eus pas le temps de faire une pause en vérité. Grâce à des films humoristiques impliquant un blond et un roux rond moustachus, je me rappelai qu’il y avait toujours un guet en hauteur sur les bateau de pirates. Mais il devait sans doute surveiller que l’horizon, pourquoi contemplerait-il son capitaine ? En vrai, c’est lui la véritable menace. Avec sa longue vue, il pourrait vite retrouver mes crétins sur mon canoë de survie. Il était donc à éliminer, et comme les autres, de la façon la plus discrète possible. Je savais très bien que si on décelait ma présence, je serais foutue. Plus de trésors pour la voleuse, plus de point de vie pour la voleuse, plus de gloire personnelle pour la voleuse… Une mort dégueulasse pour la voleuse ! S’ils se rendaient compte que leur capitaine avait disparu, ils deviendraient sans doute fous, cela dit. Mais s’ils s’apercevaient de la présence de mon navire, ça me laisserait un peu de temps pour les voler, mais je pourrais sans doute pas rentrer…

« Pas le temps de penser stratégie là. »

J’avais murmuré pour me rappeler à l’ordre. Le guetteur n’avait qu’à se retourner vers la barre pour voir qu’il y avait un problème d’absence de présence nan ? Il me fallait juste le trouver et le buter. Et très vite. Un coup d’œil me permit de souffler de soulagement : aucun iceberg droit devant cap’taine ! Je rangeai mon arme pour glisser plus rapidement jusqu’à l’extérieur du bateau. Grâce à Acrobatie, je pus à nouveau bien m’accrocher et faire succinctement le tour du paquebot en regardant vers le haut. Le lieu de garde du pirate peu efficace m’apparut et toute une série d’efforts de ma part due être faite pour l’atteindre silencieusement par derrière. Grimpant sur les cordes, utilisant les voiles épaisses mais malheureusement trouées par endroit pour me Dissimuler en même temps, tirant sur mes bras en gardant une forte accroche au bois long et gardant tous mes sens en alerte. Heureusement que tous mes ennemis étaient comme en standby. S’il y avait eu de la pluie, des rochers, ou juste des vagues gratuitement trop violentes, j’aurais pu facilement croiser un vilain sur mon chemin… Ou tomber.

Mais, comme à chaque fois que je faisais une bêtise préméditée, il semblait que tout avait été organisé pour m’y encouragée à fond. J’analysai le derrière du nouveau pirate dont les yeux semblaient jongler de gauche à droite et dont les épaules bougeaient de manière régulière et cyclique. Rien n’y faisait, le texte et ses statistiques n’étaient pas différents de ce que j’avais pu voir avec les autres pirates… En tout cas, il devait sans aucun doute posséder une dague car je ne pouvais contempler son arme. … Mais à quoi bon m’intéresser à ça ? Je l’éclatai en un coup bien placé, rendant brillante sa nuque puis tout son corps avant qu’il ne disparaisse, après avoir retrouvé mon Marteau Tueur Lumineux. La seule menace concernant l’ancien possible cri signifiant ma présence avait été dégagée, je pouvais continuer ma ruée vers l’or avec patience, violence et silence. Maintenant que j’étais en haut, j’avais une belle vue sur le nombre de pirates et j’étais bien contente de pas être née téméraire.

Il y en avait exactement quatorze sur le pont. Sachant que l’équipage était constitué d’au moins vingt membres et que j’en avais détruit trois, des triplets devaient se trouver à l’intérieur… Au minimum. Comment je pourrais faire pour détourner leur attention à ces quatorze-ci… ? Est-ce que j’aurais le temps de tous les buter si j’utilisais mon « pote » pour attirer leur attention… ? Mais je mettrais trop en danger mon bateau en faisant ça… Sans compter que ce débile avait pas une belle couleur de jauge de vie… Hum… Décide-toi vite, cocotte, sinon, les trois autres vont réapparaître ! Et dire que le mot « cocotte » était une insulte horrible…

Je déglutis d’un coup, avant de rassembler mon courage. Pour que mon illumination fonctionnât, il me fallait adopter le bon timing. Et, étant légèrement, trèèès légèrement maladroite… Il se pouvait qu’ça foire.

…Haha… Bien avant de me prendre la poutre en pleine tronche, je sus que je m’étais trop mal propulsée. En utilisant Sprint en même temps qu’Acrobatie, j’avais pensé pouvoir directement passer la porte menant à l’intérieur du bateau mais… Mais c’était sans compter mon manque d’entraînement !! Tu vois, j’te l’avais dit, t’aurais dû plus pratiquer ce mouvement ! J’aurais bien voulu être une héroïne de shônen trop classe et trop bonne à cet instant, mais je n’étais que moi, 85B, j’avais besoin de plus de temps pour perfectionner mes gestes. Il n’empêchait que, s’il y avait eu une caméra et une possibilité de voir le ralenti, moi-même j’aurais ri en me voyant me prendre le haut de la porte de plein fouet. Grâce à Sprint, le choc fut si violent que je pensai avoir réussi à casser quelque chose… C’était sans compter le « immortal object » qui était apparu comme par magie. Je m’écrasai par terre comme un vulgaire caca, soupirant intérieurement. Combien de points de vie allais-je perdre avant de tous les éliminer ? Aah, ces quatorze pirates… !

Je me ressaisis et bondis sur la pointe des pieds jusqu’au bord de la porte, comptant sur mes pieds aussi petits en largeur qu’en longueur pour rester en équilibre et réussir à refermer la petite ouverture. Le choc avec le bas de mon corps avait réussi à l’ouvrir et j’avais pas envie de rameuter les mobs cachés, déjà que les autres s’étaient déjà élancés vers moi ! Je décidai de vite prendre avantage de mon environnement : j’allais pas pouvoir me les faire tranquillement, ils étaient trop. Il fallait en mettre plusieurs de côté, le temps de pouvoir dégommer les autres sans voir ma jauge de vitalité dégringoler d’un coup. Mais je mis trop de temps pour réfléchir, et j’avais oublié que ces mobs avaient la possibilité d’attaquer à distance, eux. Des piques me lacérèrent le visage, le rendant écarlate, avant que je puisse Sprinter jusqu’au groupe de quatre pirates que je suspectais me les avoir envoyés. D’un coup circulaire vers le haut, rapide et lumineux, je réussis à en faire passer deux par-dessus bord et à en voir un exploser. Je détruisis le dernier d’un gros coup sur sa tronche après avoir repris de l’élan avec mon marteau. Heureusement pour moi, j’étais apparue vers lui si succinctement qu’il n’avait eu le temps de traîner sa longue chaîne au bout dangereux… Mais si lui ne s’était pas défendu, ses autres frères n’avaient pas tardé à courir vers son cadavre fragmenté et moi !

Il m’en restait douze à détruire, dont deux qui mettraient un peu de temps à remonter. Et avec tous les bruits que ces grognasses faisaient, il était certain que la porte que j’avais fermée n’allait pas tarder à s’ouvrir ! Anxieuse, je lançai des coups d’œil dans tous les sens avant de bondir plus gracieusement que d’habitude, après avoir pris un petit élan et compté sur Acrobatie. J’atterris avec une inhabituelle douceur sur une des poutres et décidai de circuler dessus. Il fallait que je les attende sur une des extrémités, je pourrais me les faire un par un… Ou plutôt deux par deux puisqu’ils ne seraient pas assez bêtes pour ne venir m’embêter que d’un côté. Sous leurs cris, qui étaient toujours les mêmes, j’attendis que ceux équipés d’armes à ne pas lancer montent en supposant qu’ils laisseraient seuls et sans défense les pirates dont je tentais d’esquiver les attaques longue distance. Les genoux pliés pour éviter de tomber, j’étais aux aguets et tentais de prédire leurs lancers, rejetant parfois les boulets meurtriers avec mon marteau. Malheureusement, je visais à chaque fois trop mal et ne réussis à aucun moment à les leur renvoyer violemment dans leur face dégueulasse.

Les autres pirates rapidement montés grâce aux cordes, je me concentrai et retentai le même mouvement qu’avec la porte pour faucher un « pirate longue distance » au passage. Toujours s'occuper de ces emmerdeurs d'archers en premier, c'était une de mes règle. Parce que les autres seraient obligés de se coller serrer à moi pour me frapper, contrairement aux autres ! Je coursai trois des quatre compères du dernier mort avant qu’ils ne puissent me jeter leurs armes emmerdantes et supposai leur mort après mon coup violent dans leurs côtes. Mais malheureusement, je ne pus esquiver l’attaque du dernier.

« Anphwourayt ! T’as vraiment eu que du bol ! Reviens-là, bâtard ! »

Pile au moment où j’avais décidé d’envoyer la sauce avec Sprint pour l’achever de la même façon que ses congénères, il m’avait envoyé son boulet en plein de mon nez, me stoppant dans mon élan. Et une chute pour madame, une ! Et un front râpé aussi. Cette grognasse avait pas tardé à s’éloigner, pour instaurer une distance de sécurité stratégique entre nous et ça m’avait carrément énervée ! Woo, c’était qui la boss ici, bordel de mer… Ah ?!!! Aaaaah ?????????

… La porte s’était ouverte, c’était ça ? Tu es sûre que tu veux continuer à te battre… ? Mais... Mais ils étaient combien maintenant ?!

A terre, je me prenais plein d’armes différentes dans la tronche, tentant par tous les moyens de me dégager et de me relever. Ils étaient tellement opulents que j’arrivais pas à les compter et que je peinais à voir le ciel juste au-dessus de moi. A cause de leurs pieds qui m’écrasaient autant que mon arme, je pouvais pas répliquer et je commençais à paniquer. Ma jauge de vie descendait peut-être lentement mais elle le faisait sûrement. Est-ce que j’allais mourir comme ça, comme une idiote ? Ça me rappela encore mon aventure avec ma bonne Yueko et le Quarante-cinq. J’avais encore eu trop confiance en moi, j’avais encore sous-estimé ces mobs à l’haleine dégoûtante et à l’odeur des aisselles ignoble. Dans la réalité, je devais avoir des auréoles aussi étirées que les leurs sur mes vêtements de patiente, soit dit en passant…

Alors qu’ils criaient encore comme les animaux qu’ils étaient, toujours les mêmes mots que le système avait bien voulu leur apprendre, je me surpris à rire. Crever comme ça, tuée par des gens aussi bêtes, ça te ressemble tellement pas ! Il était clair qu’ils n’avaient pas du tout usé de stratégie. Et j’allais me laisser faire comme ça alors que dans les jeux, j’étais la maîtresse des bourrins ?! Ils me défiaient dans mon propre domaine et je continuais à rester passive comme ça ?!! Remotivée, j’abandonnai mon arme temporairement et entrai profondément mon poing dans l’entrejambe d’un pirate qui fit quelques pas en arrière. Sa jauge de vie ne serait pas atteinte mais au moins, je pourrais voir un peu mieux mon environnement. Enfin à quatre pattes, j’encaissai les coups en gardant le dos rond et, sans perdre plus de temps, j’envoyai un coup de pied en plein dans le bidon d’un autre pirate qui bascula sur un de ses confrères, le faisant tomber au passage. Pas encore sortie d’affaire, je récupérai mon arme et, toujours sur les genoux, je fis une nouvelle attaque circulaire qui tua un méchant et en fit tomber trois.

A peu près libre devant, je me relevai doucement, courbée avec mes genoux les plus fléchis possible, et me retournai succinctement. Marteau dans la continuité de mon bras tendu, je détruisis dans ce mouvement un nouveau pirate et en fis tomber d’autres. Je me sentis tout à coup beaucoup mieux. Aah, si j’avais été claustrophobe là… Et hop, je bondis encore pour atterrir à nouveau sur une planche et voir d’en haut ce qu’il se passait en bas. Ils étaient neuf sur le pont et je pouvais voir que les deux pirates tombés à l’eau n’allaient pas tarder à faire leur come-back. Malheureusement pour moi, un mobs avec une arme longue distance avait décidé de se joindre à la fête et me balançait encore ses piques dans la tronche à intervalles réguliers. Comme suggéré, la porte était bien ouverte et il était possible que d’autres vilains en sortent encore et encore… Que faire ? Et cet abruti qui me balançait encore son truc là ! Il me tapait sur l'système !!

En plus, à cause de mes actions de tout à l’heure, seuls cinq pirates se servirent des cordes pour venir jusqu’à moi. Saloperie d’intelligence artificielle de mes deux ! J’attendis encore impatiemment qu’ils montent tout en essayant d’éviter au mieux l’arme longue distance de l’autre enflure avant de décider d’agir. Je sautai encore le plus loin possible puis, en utilisant Sprint pour éviter au mieux les attaques et contourner rapidement les trois défenseurs de l’arme longue distance, je frappai. Malheureusement, ces derniers s’étaient trop bien préparés à ma venue et je mis un instant pour tous les écraser. Et dégager enfin la raclure !

Mais je ne vis que trop tard la lame d’un des mouillés et elle me transperça l’épaule gauche d’un coup trop bien placé, alors que je me retournais. Je répliquai sans aucune pitié pour ses hanches brisées, repérant du coin de l’œil son ami humide et entendant trop bien les plaintes des cinq autres aux armes de courte distance. En bondissant encore et toujours, je réussis à les perturber, ceux-ci se balançant à gauche à droite et faisant des pas en avant en arrière pour me suivre : vive la vitesse des voleurs ! Je réussis à tous les détruire après vingt minutes d’effort intensif pour éviter de perdre plus de points de vie puis m’écroulai sur le pont, exténuée, à bout de souffle, toute rouge. Si j’avais su que j’arriverais à suivre ce rythme un jour…

J’avais failli me coucher au sol et prendre mon temps pour me régénérer sans potion mais finalement, je savais pas si j’étais vraiment toute seule. Des pirates pouvaient apparaître à n’importe quel moment et, avec discrétion, me tomber dessus. Je les imaginais trop bien me couper les membres pour ensuite, ne faire qu’une bouchée de mon tronc désarmé. Mais non, mourir aujourd’hui n’était pas une possibilité. Après avoir envoyé un message à mon « équipage » et vérifié sa position, je me décidai. Avec beaucoup d’effort, je me relevai et, non sans un marteau bien tenu et bien levé, j’ouvris à nouveau cette maudite porte en retenant mon souffle.

L’étroit couloir était plongé dans des ténèbres légèrement trouées et m’aurait fait circuler en apnée si j’avais pas eu toute confiance en mes capacités. J’eus quand même une pensée vulgaire pour la compétence Vision Nocturne… Je faillis me péter la tronche dans les escaliers mais je réussis quand même à garder ma tête haute, en faisant comme si j’avais pas trébuché, au cas où il y aurait eu un voyeur dissimulé. En pensant à ce verbe, je remarquai que la pénombre était parfaite pour me cacher si je décelais un problème. Prudente, je visitai l’endroit en tentant de faire le moins de bruit possible… Ce qui était peine perdue avec mes pieds.

Ils étaient minuscules mais ça les empêchait pas de toujours faire un boucan pas possible, quel que fût le sol sur lequel ils progressaient. Et j’avais beau m’appliquer jusqu’à perdre une heure pour faire cinq mètres, mes pas raisonnaient éternellement en écho. En tout cas, c’était la première fois que je visitais l’intérieur d’un vrai gros bateau, ce qui était excitant et effrayant à la fois. J’avais peur de me paumer. Les « navires » de mon père avaient toujours été de premier prix et, à part dans les films ou les dessins animés, j’avais jamais eu l’occasion d’en croiser. Ce fut donc avec surprise que je me rendis compte à quel point c’était grand. Le premier couloir menait à plein d’autres couloirs et j’étais à présent sûre que j’allais me perdre. Mais bon… J’avais un mâle pour me retrouver, non ?

Je décidai de trouver la salle aux trésors – ou de faire le ménage total du bateau si jamais il n’y en avait pas – et de n’appeler qu’ensuite ce crétin de joueur de mes deux seins. S’ensuivirent donc les minutes les plus longues de toute ma vie (j’exagérais, à chaque fois que je me perdais, ça me donnait toujours cette impression) qui eurent autant de bons que de mauvais côtés : au moins, j’avais PAS de carte donc je possédais une raison primordiale de me perdre ! A un moment, en tournant en rond, je crus entendre un bruit et je me jetai par terre avant d’utiliser Dissimulation, profitant de meubles et de noir pour me fondre dans le décor en retenant ma respiration. Après cinq minutes d’attente, il s’avéra que j’avais rêvé et, un soupir plus tard, je me remettais à bouger.

Tous les couloirs comportaient énormément de pièces diverses. Des chambres, des renfoncements à débarras ; je trouvai même une cuisine et fut épatée de me rendre dans une salle pleine d’armes. Malheureusement, je ne pus les piquer, ce n’était pas des vraies mais des immortal objects. A force de tourner en rond, j’en eus marre et appelai mon récent esclave à la rescousse, pour anticiper, en continuant à marcher. Ce ne fut que lorsqu’il m’envoya un message vingt minutes après pour m’annoncer son entrée sur le pont que je découvris ce que je cherchais.

Une porte. Une porte verrouillée. Avec un immense sourire d'enfant comblé, j’avais jeté un coup d’œil dans la serrure en espérant contempler un truc merveilleux disposé en tas appelé « or » mais je ne reluquai que le rien. Mais… Une porte fermée ne pouvait que renfermer quelque chose de précieux, non ? Avec une délicatesse qui me surprit, j’utilisai Crochetage, mettant en pratique mes talents de Voleuse.