Le 22 Mai 2023

La vie dans ce monde n’était pas de tout repos mais elle me plaisait. Mon corps était si léger en comparaison à l’autre monde, je n’avais pas de problèmes de dos ou tout autre handicape de vieillesse. Je n’avais pas vu beaucoup de quadragénaires depuis que je vivais ici, mais l’âge n’avait pas la moindre importance. Le corps ne montrait aucun signe d’évolution, ce qui était stimulant mais j’imaginais sans peine que les enfants n’étaient pas du même avis que moi. J’avais passé quelques temps à farmer les monstres pour monter mon niveau, j’avais acquis quelques cols et j’étais maintenant niveau vingt-et-un. J’avais dans ma bourse un peu de nourriture ainsi qu’une potion de soin. Ces dernières m’avaient bien été utiles, je serais certainement mort si je ne les avais pas utilisées. Je me promenais tranquillement à travers les étages de bas niveau en faisant attention aux monstres. En passant devant une boutique je décidais d’y entrer pour faire quelques emplettes.

Quelques minutes plus tard, j’étais sorti avec deux potions de soin de niveau 1, un cahier ainsi que de quoi écrire. J’étais prêt pour une toute nouvelle aventure, l’étage numéro trois était agréable. L’air était pur, la vue des montagnes faisait rêver et la verdure de la forêt était plaisante à regarder. Je ne m’étais jamais attardé dans ce petit village, je n’avais pas encore pris le temps de profiter du paysage de Sword Art Online. Il est vrai que survivre demande beaucoup d’attention et de concentration, mais savoir profiter de ce qui nous entoure est tout aussi important. C’était avec cette idée en tête que j’arpentais l’endroit, au détour d’une ruelle un peu sombre une ombre apparue devant moi. Je sursautais de surprise, je ne l’avais pas entendu. Je me fis la réflexion que j’étais un peu trop détendu, s’il avait été question d’un monstre, j’aurais subi une attaque sans même réagir.

Un vieil homme se tenait devant moi, il était la caricature du vieillard un peu fou du village. Il portait de grosses lunettes rondes, sa barbe s’étendait jusqu’à son nombril mais je ne pus cacher un rictus en voyant qu’il avait la même couleur de cheveux que moi. Toute sa posture est courbée vers l’avant, le poids de son corps était retenu par sa canne mais le plus étrange était ses mouvements. Ils étaient saccadés comme s’il fonctionnait au ralenti. J’écoutais son histoire, le pauvre homme venait de se faire voler sa bourse qui lui avait été offerte par sa femme. Au moment où il me demanda si j’acceptais de l’aider, une fenêtre de dialogue s’ouvrit devant moi.

Acceptez-vous la quête  Au voleur ?

Sans une hésitation je positionnais mon doigt sur le rond bleu pour accepter. Il m’indiqua un détail de dernière minute, le voleur n’était pas humain mais un Marsupial Tueur. Je m’éloignais alors que le PNJ était toujours en train de raconter la même anecdote depuis les cinq dernières minutes. Je sortis mon carnet d’information commune que j’avais récupéré dans une boutique, je le feuilletais jusqu’à tomber sur la page qui m’intéressait. Le marsupial Tueur était un monstre qui se baladait d’arbre en arbre, redouté pour son agilité et mêlant sa vitesse et son couteau pour attaquer ses ennemis. Ma lance en main, je me dirigeais paisiblement en direction de la forêt que je pouvais apercevoir au loin.

Recap' Achat:

La masse verte était en face de moi, je réfléchissais en marchant. J’étais au troisième étage et les monstres n’étaient pas d’une grande menace pour moi. Toutefois j’avais décidé de ne pas foncer tête baisser, j’avais encore des lacunes concernant mes compétences d’armes. La situation était adéquate pour m’entraîner, même si je faisais une erreur, je n’allais pas beaucoup en souffrir dans cet endroit. Ma présence dans cet étage était liée à l’achat du carnet dans la boutique. J’avais pour objectif d’explorer les différents étages et de récupérer autant d’information possible. Je disposais du livre d’information commune, mais je voulais vérifier s’il était inscrit la vérité ou non.

Il y avait encore beaucoup de débutants dans la ville de départ, mes premiers niveaux ont été rapides à atteindre. J’ai formé des groupes pour monter mon expérience rapidement, certains ont duré plus longtemps que d’autres. Je me demandais comment s’en sortais mes anciens compagnons, aux dernières nouvelles ils appartenaient au front de libération. Nous nous sommes séparés sur un coup de tête, j’ai continué d’errer avec d’autres personnes en me préoccupant uniquement de mon niveau. Je voulais aider ceux qui étaient terrifiés par ce nouveau monde. Je voulais montrer que les premiers étages étaient accessibles pour tout le monde.

Je m’installais tranquillement sur un caillou un peu en hauteur, la pierre était plate et je pouvais aisément poser mon encrier à mes côtés. J’ouvris mon carnet et je commençai à écrire l’étage dans lequel je me trouvais puis le PNJ qu’il fallait aller voir pour commencer la quête. J’indiquais également qu’il était obligatoire d’écouter son histoire et qu’il ne fallait surtout pas se laisser distraire par son comportement étrange. Etant anciennement programmeur j’avais l’habitude d’écrire ma démarche avant de commencer un projet. J’en fis de même en notant les étapes que j’allais devoir traverser.

Dans un premier temps, je devais me rendre dans cette magnifique forêt. Les monstres n’approchaient pas du chemin, du moins jusqu’à maintenant. De ce côté-là je pouvais être tranquille, j’avais aperçu au loin un plan d’eau et je voulais voir s’il était possible de pêcher. La seconde étape était de repérer les Marsupial Tueur, d’essayer de les comprendre et d’analyser leurs habitudes. Ensuite je devais trouver ma cible, un monstre de cette espèce qui possédait une bourse, le vaincre et ramener le butin au PNJ. A l’écris c’était simple, mais tout ne se passait jamais selon le plan. Je retournais mon cahier pour écrire à la fin, je voulais séparer les informations des quêtes, du bestiaire. Je laissais quelques pages pour les étages inférieurs, ma description du palier numéro trois allait commencer avec le Marsupial Tueur.

Je rangeais mes affaires dans mon inventaire, à bien y réfléchir j’aurais dû prendre deux cahiers. J’aurais aimé écrire toutes les observations et les pensées qui me passaient par la tête. En attendant, je pouvais toujours écrire sur n’importe quelle page et la retranscrire plus tard. Je me levai et commençai à prendre la direction de la source d’eau que j’avais vue. Arrivé à sa hauteur, je pus remarquer qu’il s’agissait d’un coin de pêche. J’affichais un large sourire, j’allais pouvoir manger sans frais.

Je bougeais mes doigts pour ouvrir mon inventaire comme je l’avais fait de nombreuses fois auparavant. Je rangeais ma lance, je lançais ma compétence pêche et ma canne apparut dans mes mains. Je devais effectuer un geste précis pour que mon aptitude soit active, je tenais quelques secondes mon bras en arrière puis je lançais mon hameçon dans l’eau. Il me restait à attendre qu’un poisson mordre pour le ramener à moi. Il n’y avait personne autour de moi, l’étage était calme. Il ne me manquait plus qu’une bière pour me croire à la maison.

La forêt ne se trouvait pas très loin de moi, je pouvais apercevoir l’entrée à quelques centaines de mètres. Je me demandais si les monstres m’avaient déjà repéré mais j’en doutais. Il y avait plusieurs réactions possibles, soit ils se cachaient, soit ils m’attaquaient. Ils pouvaient aussi m’ignorer mais ce n’était pas bon signe. Mon flotteur commençait à bouger étrangement, j’allais enfin attraper mon premier repas. Le moment était venu, je tirai de toutes mes forces et ma récompense sorti de l’eau pour atterrir dans mes bras. Il se transforma en item et s’ajouta à mon inventaire.

Je me sentais d’humeur patiente, je retentais l’expérience une nouvelle fois. J’en profitais pour ouvrir mon arbre de compétences. Pêche et cuisine n’étaient que niveau huit, je m’étais principalement concentré sur l’offensive ses derniers temps. Ma limite était le palier huit, je ne pouvais ni pêcher ni cuisiner au-dessus. Je comptais les améliorer mais pour cela il fallait pratiquer. Même si j’aimais beaucoup cette activité, je ne me voyais pas passer ma journée avec ma canne à attendre. Pour ce qui était de faire à manger, j’avais un problème de ressources. J’avais mis des points en agriculture mais il me fallait acheter un champ ainsi que mes premières pousses.

Je laissais mon esprit divaguer, je ne savais pas ce qui était possible d’être cultivé ou non mais j’imaginais planter du houblon pour préparer ma propre bière. Le choix des compétences était difficile, je ne m’étais pas orienté à cent pourcent dans le combat mais j’ai préféré tout faire pour vivre une nouvelle vie. Je tirais rapidement sur le manche pour attraper ma deuxième prise. Coup de chance, j’ai pu attraper deux poissons en même temps. Mon activité continua quelques minutes supplémentaires, j’avais cinq nouveaux items dans mon inventaire et de quoi me faire un vrai festin.

L’heure du repas approchait, je fis rapidement un feu et l’alluma grâce à la compétence cuisine. Je n’avais aucune épice et aucune sauce pour accompagner mon poisson alors je le fis simplement grillé. La nourriture n’avait pas autant de gout que dans l’autre monde mais je m’y étais habitué. Avec un peu plus de ressources et de vrais instruments de cuisines il était certainement possible de faire un bon repas. L’idée d’ouvrir un restaurant ambulant me traversa l’esprit, c’était un concept intéressant qui me permettait d’améliorer mes compétences et de m’enrichir. Ça pouvait également aider les aventuriers dans le besoin, je notais cette idée dans mon petit carnet, à penser pour plus tard.

Récap':

Devant moi se trouvait l’entrée de la forêt, je ne savais pas pour combien de temps j’allais en avoir mais combattre n’était pas une option. J’entrais avec précaution, je ne voulais pas me faire repérer, non pas parce que j’avais peur mais je voulais espionner les monstres. J’étais curieux de savoir s’ils avaient un mode de vie, des habitudes, une hiérarchie ou tout autre aspect qui les rapprocheraient de nous. Je me maudissais de ne pas avoir pris les compétences dissimulation, traque et les visions accrue et nocturne. Je devais faire sans, il était question de patience et de discrétions.

J’avais comme hypothèse qu’un monstre possédait un champ d’action autour de lui plus ou moins grand. Lorsqu’une personne pénétrait à l’intérieur, il était capable de la repérer si elle n’était pas cachée. L’enjeu pour moi était de trouver cette limite avant de me faire encercler et pour cela je devais avancer petit pas par petit pas. Tous mes sens étaient en alerte, je pouvais réagir au moindre bruit. J’avançais lentement dans le feuillage de la forêt, le soleil était encore haut et malgré les arbres la visibilité était encore bonne. La pression était à son comble, d’un côté je savais qu’ils ne me feraient pas beaucoup de dégâts, mais je n’avais pas envie d’en faire l’expérience.

Marcher dans ces conditions était épuisant. Je fis une pause pour souffler un peu mais c’était à cet instant qu’un Marsupial Tueur se montra. Il était à bonne distance et n’avait pas l’air de m’avoir repéré. J’en profitais pour utiliser ma compétence d’analyse sur lui, je notais les résultats obtenu dans mon carnet à la page correspondant. Je coupais ma respiration quand je faisais un demi pas dans sa direction, j’attendais quelques secondes pour reprendre mon souffle et recommençais. Il ne bougeait pas, il restait droit comme un piquet en me tournant le dos. Le pas que je fis l’inquiéta immédiatement, il se mit à bouger et à tourner la tête dans tous les sens. Il allait regarder dans ma direction quand je fis machine arrière. J’avais trouvé la limite mais je n’étais pas capable de la chiffrer.

L’excitation monta en moi comme un enfant qui reçoit un nouveau jouet. Je fis plusieurs expériences pour délimité sa zone et j’avais pu remarquer une chose intéressante. Ce n’était pas un cercle parfait autour de lui comme je l’imaginais, non sa zone d’action avait une allure étrange. Je pris mon carnet pour dessiner mais je me rendis compte que j’en étais incapable, le dessin devait être une compétence à part entière. Pour combler ce manque j’inscrivais des petits « o » à la place des traits que je voulais faire. Ce n’était pas très beau mais je pouvais avoir un aperçu global. Ce qui était étonnant, c’était que la forme de la zone ressemblait grosso modo à un triangle. Il pouvait me repérer de plus loin si j’étais juste derrière lui que sur les côtés.

Le marsupial commença à bouger, il avança devant lui dans une direction qui m’était inconnue. Je le suivais, discrètement en me tenant sur sa gauche en vérifiant chaque seconde sur mon schéma qu’il lui était impossible de me voir. Malheureusement, il repéra ma présence sans toutefois savoir où je me trouvais. Je réussis à me cacher juste à temps, je compris que sa zone d’action dépendait de l’environnement. En réfléchissant, c’était logique mais je n’oubliais pas qu’à la base ce n’était rien d’autre que des programmes informatiques. Je continuais de le suivre et j’avais même décidé de lui donner un petit nom, Ed. L’espionner m’apprenait beaucoup de choses sur ce nouveau monde.

Récap':

Je suivais Ed, il ne le savait pas encore mais il était devenu mon nouveau meilleur ami. Le prendre en filature comme je le faisais me rappelais mon enfance quand je jouais aux détectives. A l’époque je n’étais pas discret et les adultes entraient dans mon jeu pour me faire plaisir, ce que je ne remarquais pas. C’était différent aujourd'hui et heureusement. Je n’étais toujours pas repéré mais une question me traversa l’esprit, pourquoi était-il au sol alors qu’il était décrit comme un monstre se déplaçant d’arbre en arbre ? Je m’arrêtai quelques instants pour faire un pause et examina les alentours avec beaucoup de précautions.

Mes yeux regardaient partout et je l’aperçu, à peine visible juste au-dessus d’Ed. Un autre Marsupial Tueur était caché dans les arbres. Ils se déplaçaient en parfaite synchronisation, cette découverte me fit rayé le champ d’action que j’avais dessiné un peu plus tôt. Je notais à la place qu’ils étaient deux pour faire ce qui semblait être un tour de garde. Ce n’était pas étonnant qu’il pouvait me réparer même s’il était dos à moi, avec cette formation il était difficile de les prendre par surprise. Toutefois, ma présence pouvait signifier une chose, leur vue n’était pas développée. Pour tester ma théorie j’avais décidé de faire le pari un peu fou de me montrer derrière eux sur le chemin, caché par aucun arbre. Ce fut concluant, le monstre en hauteur devait logiquement faire une vérification à trois cent soixante degrés mais il ne me repéra pas.

En revanche, je ne pouvais pas en dire autant concernant leur audition. J’étais relativement proche d’eux, j’estimais la distance à vingt ou cinquante mètres. Le bruit de mes pas ne les gênait pas mais si je faisais craquer une branche ils se mirent aussitôt en alerte. Pour les comparer aux humains lambda, j’évaluais leur vue à un dixième de la nôtre et la moitié de notre ouïe au minimum. Je n’avais pas pu tester leur odorat mais s’il avait été développé ils m’auraient repéré depuis longtemps. Dans le doute je suis partie du principe qu’ils en avaient autant que moi.

Je continuais de les suivre quand Ed grimpa très rapidement dans un arbre. Je m’étais arrêté par réflex mais en tendant l’oreille je pouvais deviner qu’ils se déplaçaient plus rapidement. Aucun humain ne pouvait rivaliser avec leurs vitesses quand ils étaient dans des arbres. J’ai couru de toutes mes forces pour essayer de les suivre, je pensais les avoir perdu quant au détour d’un feuillage je fis une découverte pour le moins déconcertante. J’avais devant moi ce qui semblait être un nid.

J’étais arrivé aux villages des Marsupial Tueurs. J’avais toujours cru que les monstres apparaissaient aléatoirement comme dans un vrai jeu mais je me trompais. Toutefois je ne devais pas oublier que ma quête leur était plus ou moins dédiée, ce qui pouvait influencer leurs comportements. Laissant trainer mon regard sur le repère ennemi, je n’observais aucun bâtiment correspondant à une maison. Avaient-ils besoin de dormir ?  Un bruit assourdissant retentit soudainement, des beuglements à ne plus s’entendre penser. La raison de cette agitation était l’arrivée d’un Marsupial Tueur qui avait accroché sur son couteau une bourse. C’était lui, ma cible venait d’arriver au village en même temps que moi. Tout ceci était un peu trop scripté mais je ne pouvais faire aucune comparaison, peut-être existait-il plusieurs endroits où ce monstre devait apparaitre en fonction de notre localisation. Je n’en savais rien mais je n’avais pas le temps de m’en préoccuper, tout ce que je devais faire était de réfléchir à un moyen de lui voler la bourse.