Etage 9, une étape comme une autre vous me direz. Je monte les étages petit à petit en ce moment, à quoi bon se presser. Il y a plusieurs mois que je me suis fait une raison, ça a beau faire des semaines et des semaines que cette tragique affaire est arrivé, elle me hante encore. Les hurlements sont désormais devenus des souvenirs et les larmes des sourires. Il ne sert pas a vraiment à grand-chose à se lamenter sur son sort et regretter en vain nos actes. Il est plus utile d’avancer et de regarder devant soi pour voir ce que l’avenir nous apportera. Après tout désormais j’ai un but, un chemin à arpenter pour suivre le fil de mon destin. C’est pourquoi ma progression est lente et peu construite. Je ne suis pas réellement en quête d’expérience ou autre items rares, je laisse ce genre de visions à ceux qui ont choisi de se battre au front comme ils le disent. Ce groupe de joueurs qui cherchent par tous les moyens de continuer vers le sommet pour essayer de s’enfuir d’ici. Ou peut-être essayent-ils de s’en convaincre ? Après tout qu’est-ce qui nous garantit que tout ceci sonnera la fin de cette aventure, pour ma part, chaque jours je regarde les nuages qui défilent devant moi et j’essaie encore de déterminer s’ils sont réels ou non. La part de moi ne désirant pas quitter cet endroit grandit de jour en jour et pour être honnête … ça commence à me faire peur.

D’un mouvement ferme j’ouvre la porte d’une taverne. Le bâtiment ne paye pas vraiment de mine depuis l’extérieur mais l’intérieur est un peu plus rempli que je ne l’imaginais. Il n’y a pas vraiment foule, les quelques tables prisent, le sont essentiellement par des joueurs. Ils mangent ou ils boivent, à leur faim et à leur soif j’imagine. Pour ma part, je ne m’attarde pas dans l’entrée. Quelques regards se sont posés sur moi à mon arrivée, surement les plus curieux. D’une allure lente et assurée, je me rapproche du comptoir. Comme on peut s’y attendre, le tavernier est là, verre dans une main, chiffon dans l’autre astiquant le cristal pour passer le temps. Sourire aux lèvres, je le salue sur un ton chaleureux, je fais partie des gentil quand même. Déterminer à me poser un petit moment, je préfère pour l’instant commander un petit encas. Un petit casse-croute et un petit verre de jus, une simple collation visant plus à couper ma faim que la satisfaire. Accoudé au bois qui sert de comptoir, j’observe un peu la pièce. Il est évident que certains joueurs ici ont plus que le level pour les quelques mobs de cet étages, peut-être font-ils une halte ou alors un rendez-vous galant ? Je soupire rien qu’à cette idée. Ca fait belles lurettes que je n’ai pas eu de contact aussi intime avec le sexe opposé, on a beau être dans un univers totalement anarchique par rapport à notre monde, on en reste pas moins des humains. La femme de ma vie est peut-être dans cette facette du numérique qui sait.

Légèrement rassasié, je me suis enfin mis en route ce pourquoi je suis véritablement ici. Remerciant gracieusement le tavernier de son accueil, mains en poches, sourire omniprésent, mes pas se dirige vers une femme coincé au fin fond de la salle. Toutes les quêtes de boss suivent le même enchainement et les rouages. A peine quelques paroles échangés et me voilà en possession du nouvel ordre du jour. Simple dans l’exécution, il suffit de défourailler la chimère de cet étage. Nul besoin de s’attarder ici désormais. Je n’oublie surtout pas de faire un petit clin d’œil à une petite blonde installé à l’autre bout de la salle avant de quitter la taverne. A peine le pied dehors, me voilà de nouveau agresser par les lumières intenses de la ville souterraine.. Une luminosité qui ne manque pas de faire ressortir l’éclat du bel émail de ma dentition. Un homme se doit de sourire qu’importe la situation. Je suis d’ailleurs remonté à bloc, ça fait presque une semaine que je ne suis pas allé dégommer de mobs. Mon sabre va finir par rouiller a cette allure. Aller il est temps ! Mes mains retournent dans mes poches et c’est d’un assuré que je m’approche de la destination de la quête. Les choses sérieuses commencent !

La porte est là face à moi, elle indique le début du donjon. S’il existe un moment pour faire demi-tour, à l’instant présent c’est celui-ci. Si jamais je me retrouve a un faire un pas de plus, il sera inconcevable de faire machine arrière. Il fut une époque pas si lointaine où je parcourais ce genre d’endroit en petit comité de confiance. Ce type d’aventures rimait alors avec tranche de rire et taquineries mais il faut croire que les choses changent ou du moins elles évoluent. Je ne sais pas où tu veux que ce chemin escarpé me mène, destin. Mais sache que je suis prêt ! L’inconscient ne sera jamais mon allié au risque de te décevoir, même si je suis certain que tu n’en a gère quelque à faire. C’est donc souriant, confiant, animé d’une certaine rage de vaincre et d’une main en poche, que de ma paume libre de mouvement, d’une façon franche j’ouvre les portes du donjon du pallier 9. Sans même en attendre l’ouverture complète, j’emboite le pas déterminé à juger la durabilité de mon arme. Je ne peux m’empêcher de lâcher un rire de satisfaction.

Hayate ▬ Aujourd’hui, du pixel va voler en éclat !

Il est évident qu’à peine les portes passées, ma poigne la plus puissante a pris place sur mon arme de cœur. Un geste peu confortable en soi, mais qui permet d’être sur ses gardes en toutes circonstances. Les mobs sont assez peu présents dans le début du donjon. Souvent par petit paquets de deux ou trois, mais surtout leur lvl est bien amoindrie. Ca me surprend un petit peu, même si je me trouve dans le début de l’instance je m’attendais à un peu de résistance. Je trouve sur mon chemin essentiellement des lapins-garou ou des octodon gourdin. Je pensais que la zone était surtout une zone de félins pourtant. Suis-je réellement rentré dans l’instance ? Une idée peu convainquant qui m’a quand même suivit pendant ma première heure d’exploration. J’ai beau être dans l’arène de l’étage, en soit je ne rush pas. Quand bien même cela fait perdre un temps assez conséquent j’essaie d’explorer tous les endroits de la zone. Ceci implique des fois de rebrousser chemin a certaines intersections pour ne pas trop avancer dans la zone. Les ennemis étant assez peu nombreux pour l’instant et de puissance plutôt limité puisque aux vu des dégâts qu’ils m’infligent, je n’ai pas eu encore le besoin de faire de pause pour régénérer mes pv’s. Deux conditions qui s’apprêtent à mon exploration excessive.

Les véritables choses se corsent quand mon avancé m’amène a une nouvelle intersection. Au loin j’aperçois deux autres players au milieu de ce qui semblent être une rude bataille, pour eux en tout cas. Mon acuité visuelle moyenne me permet simplement de voir qu’ils sont en train de se battre face à des lionnes dent de sabre, si j’en croire notre petit manuel sur le bestiaire de ce monde. Sans même réfléchir, je dégaine mon sabre et aussi rapidement que mes jambes me le permettent, je me dirige vers le groupe. Sans même m’y attendre je fais une arrivé triomphante. Dans une glissade sur le côté droit, mon arme chargé de la lumière rougeâtre du « spell », je tranche de manière horizontale le félin juste en face de moi. J’avais pris soin de m’interposer entre le mob et notre player. La pauvre féline devait être affaiblit puisqu’un seul de mes coups suffit à la faire disparaitre. A cette simple vue, mon sourire ne peut être que rayonnant. S’en suit alors un combat acharné avec cinq de ses compères. Je ne fais gère attention aux autres protagonistes, mon sourire a laissé place à un visage platonique, signe de ma concentration. J’essaie du mieux que je peux de tirer un maximum de ma compétence stratège qui me permet de faire un fort taux de dégâts, le tout couplé à ma précision et donc les dégâts critiques, mes coups sont peu nombreux mais efficaces.

Après quelques minutes, nous revoilà enfin seul. Tous les assaillants ont rejoints le cimetière. Le combat fut rude et pas sans peines. Ma barre de vie a pas mal baissée, il va falloir que je me repose pour regagner quelques pv’s. Légèrement exténué, je souffle un grand coup et me tourne vers les précédentes victimes. Je suis légèrement surpris quand je vois là deux gamins si on peut dire. Ils ont clairement en dessous de la moitié de mon âge et au vu de leur stuff, ils n’étaient clairement pas préparés pour un tel donjon.

Gamin ▬ Je crois qu’on vous doit des remerciements sur ce coup-là.
Gamin ▬ Pff tu parles faker, a moi tout seul j’aurais pu m’en débarrasser.
Gamin ▬ Ouais, ouais, comme les lapins garou de tout à l’heure c’est ça ?
Gamin ▬ Pourquoi il faut toujours que tu remettes les mauvais souvenirs sur la table ?
Gamin ▬ C’est comme ça avec les idiots.

Sans savoir trop pourquoi ma main droite vient se poser sur la tête de celui qui semble en avoir un peu moins dans le crâne. Grand sourire aux lèvres, je ne peux m’empêcher de rigoler.

Hayate ▬ Le courage c’est une bonne chose, gamin ! L’inconscience elle te mènera à ta perte. Sans vouloir vous vexer, je ne crois pas que vous êtes armés pour ce genre de battaille.
Gamin ▬ Il semblerait que non, sans vous manquer de respect, peut-être pourrions-nous faire un bout de route ensemble ?
Hayate ▬ Je vais être au regret de refuser. Je joue en solo, je vous conseille de rebrousser chemin et de retenter votre chance un autre moment.

Ils semblent déçu de la nouvelle. Après tout voir sa propre faiblesse en face fait toujours mal à notre égo. Il vaut mieux ça que de mourir bêtement. Après ça, nous nous sommes assis, près d’un tronc pour souffler un peu et échanger un minimum. C’est surtout eux qui ont parlés pour tout dire, mon histoire ne convient pas vraiment pour ce genre de rencontres opportunistes. Quelques heures plus tard, nos vies de nouveaux pleines, on se quitte. Eux rebroussant chemin et moi continuant dans la peine ombre. Je venais d’avoir affaire aux fameux félins du donjon et ils m’avaient donné du fil à retordre. J’allais devoir être plus prudent pour la suite des évènements. A croire que cet étages ne va pas être la partie de plaisir que je m’attendais.

Ils sont là, au détour d’un embranchement. Intrigué par un bruit que l’on peut qualifier de grognement, si je peux me permettre, je me suis activement mit dans l’ombre d’un énorme tronc recouvert de mousse. Par chance la distance qui m’éloigne des deux individus est assez importante pour ne pas mettre en alerte leur agro. Furtivement je jette un coup d’œil. C’est deux lapins-garous. Ils ont beau ressembler aux autres créatures du donjon, ici la bave qui se dégage de leur mâchoire me laisse penser qu’ils sont d’un tout autre level. Je prends alors un petit instant pour réfléchir, dois-je les contourner ou bien les affronter ? La réponse me vient assez rapidement en tête. La fuite n’est plus vraiment une option depuis quelques temps. Il parait qu’un homme doit savoir montrer ses corones ! Alors aucun n’argument ne sera recevable pour appuyer tout défilement. J’exprime un tout petit sourire et ni une ni deux me voilà dévoilant ma position.

Durant ma course j’active ma compétence « stratège », un outil performant qui est surement le meilleur des atouts quand un forgeron décide de passer à l’offensive. A ce moment précis plusieurs stat arrivent dans ma vision, vos meilleures trajectoires ainsi que les meilleurs points de frappe sur un ennemi pour lui faire un maximum de dégâts. Il semble que mon initiative a pris de cours les deux lapins transformés. Arrivant à leur niveau je n’ai pas trop de mal à me positionner derrière l’un d’eux. Sabre en main, comme pour les félins de tout à l’heure voilà que ma lame se m’est à rougir annonçant brièvement mon attaque. Agrippant fermement la garde, j’exécute un mouvement vertical de haut en bas venant trancher le dos de mon adversaire. Je vois alors sa vie diminuer de plus de moitié. A là vue de cette information je souris, j’ai mes chances. Prit dans un certain élan de confiance, ma détermination augmente elle aussi, je suis chaud bouillant. Malheureusement je suis lent, trop lent. Mon premier coup a fait mouche certes mais me voilà au corps à corps avec ces monstres. Aucune chance d’esquiver ou encore de parer, chacun d’eux m’assènent un coup de griffe horizontal. Mon Dieu ! Je vois ma barre de vie descendre drastiquement. Aurais-je crié victoire trop vite ?

Le temps n’est pas vraiment à la réflexion, il faut réagir vite ! Ce ne sont pas n’ont plus des flèches non plus. Là ! Une ouverture ! Sans plus attendre, je serre du plus fort que je le peux mon arme et sans même apprêter attention à mon environnement, je tranche ma précédente victime sur le flanc. Comme je l’avais espérer le voilà qui vole en éclat. Mon action m’a couté de ne pouvoir esquiver mon second adversaire, une nouvelle attaque me fait perdre des pv’s. Me voilà déjà dans la zone jaune, il va falloir terminer rapidement cet ennemi ou ça sera fini du petit Hayate. Un échange de coups plus tard nos vies sont pratiquement égales. Je jette un dernier regard sur la mienne … Rouge. Serait-ce la fin ? Vais-je m’éteindre ici ? Destin, que vas-tu décider ? A cette pensée je ferme un instant les yeux, ma lame vient de le transpercer. Un instant plus tard, la voilà qui de quitte son corps je m’aperçois d’une chose ... Oui c’est là ! J’en ai l’opportunité, il semble que ma vitesse a joué en ma faveur. J’en suis certain désormais, je peux mettre un terme à ce combat ici et maintenant, pas question de crever ici ! Avant même que le lapin-garou ne puisse bouger de nouveau, je viens lui pourfendre le crane pour la troisième fois, un ultime coup qui va me permettre de souffler un peu. Je l’ai échappé belle …

Quelques minutes se sont écoulées. Je viens de retrouver mon souffle. Sans trop tarder j’avale ma potion de soin de niveau 1. Ma barre de vie remonte à l’orange, je me sens un peu soulagé. Je regarde mon arme au sol, je crois bien que j’ai mis toute ma force dans ce dernier coup. A cette vision j’éclate de rire, surement nerveux mais qui me permet de détendre les quelques nerfs encore crispés en moi. Rengainant mon arme dans son fourreau, j’en arrive à l’évidence que moi-même je ne suis pas encore prêt. Il faut savoir appliquer ses propres conseils des fois. Reprenant mes bonnes habitudes, mains dans les poches, je décide de repartir vers la sortie du donjon. J’ai encore du chemin a faire avant de pouvoir prétendre de jouer ainsi en solo.